Réalisé par John Shank. France/Belgique. Drame.
1h43. (Sortie 28 décembre 2011). Avec Vincent Rottiers, Anaïs Demoustier et Florence Loiret Caille.
Attention à l’Aveyron en 2012 !
En ce début d’année, le cinéma français semble avoir établi sa base arrière dans l’Aveyron, puisqu’après "L’hiver dernier”, on pourra bientôt voir "Entre les bras" de Paul Lacoste et "Y a pire ailleurs" de Jean-Henri Meunier, films eux aussi tournés dans ce département.
Mais pendant qu’"Entre les bras" fait découvrir deux restaurateurs hors pair et que "Y a pire ailleur"s" s’attache à la vraie vie haute-en-couleur d’une bande d’énergumènes de Najac, John Shank, lui, a choisi la fiction pour aborder avec "L’hiver dernier" la condition de plus en plus terrible des paysans français.
Seuls, à la merci du moindre aléa, ceux qui s’accrochent aux métiers de la terre semblent condamner à très court terme. C’est en tout cas le sort qui attend Johann, jeune paysan solitaire qui élève ses vaches sur un plateau isolé, un paysage d’une beauté ingrate et folle.
Pas besoin de beaucoup de paroles ni d’images insistantes pour faire comprendre qu’il est désormais insensé pour un garçon à peine adulte comme Johann de poursuivre son élevage. Il aura beau tout faire : il est condamné. Enfermé dans sa lutte et dans son mutisme, la carabine à la main comme un héros d’un western improbable, il s’entête parce qu’il ne lui reste que cet entêtement.
Puissamment incarné par Vincent Rottiers, toujours à son aise dans ce genre de rôle, Johann est le constat du mal être paysan. Fini le temps où les campagnes françaises post-exode rural étaient semi-riantes, où les paysans qui avaient fait le choix de rester en tiraient certains fruits. La crise est revenue et le cinéma de la fin annoncée de la ruralité de retour.
Sans doute ne faut-il pas trop noircir le tableau : John Shank, belgo-américain amoureux de l’Aubrac, est du côté des hommes et, jusqu’au bout, vante leur énergie - qu’on peut qualifier sans hésiter d’admirable, même si le désespoir n’est vraiment pas très loin.
Il faut peut-être du courage pour venir fraterniser avec un homme qui se bat en pure perte, mais c’est le pari de John Shank - et il est forcément respectable - de croire qu’on peut se rendre dans une salle de cinéma en 2012 pour autre chose que manger du pop-corn.
Son film, sensible, nuancé, jamais sociologique, est à la portée de tous les regards. |