Réalisé par Federico Veiroj. Espagne/Uruguay. Drame.
1h07. (Sortie 28 mars 2012). Avec Jorge Jellinek, Manuel Martinez Carril et Paola Venditto.
Tous les cinéphiles du monde devront bientôt montrer le billet prouvant qu’ils sont allés voir "La Vida Util". Car ce film uruguayen est leur film.
Les tribulations (minimalistes) du programmateur de la Cinémathèque de Montevideo devraient leur rappeler bien des choses.
Parmi eux, il doit y en avoir plusieurs centaines qui ont connu les mêmes angoisses que Jorge Jellinek quand il a fallu inviter à prendre un café une vieille fille qui les fait soupirer depuis leur lointaine adolescence.
Comme le héros de "La Vida Util", il leur aura fallu une énorme dose de volonté et d’inconscience pour franchir le pas décisif qu’ils n’avaient pas osé franchir pendant toutes ces années où ils ont vécu dans le noir, mal assis et mal aimés, pour découvrir les chefs-d'oeuvre du septième art et avoir un bon prétexte pour ne pas vivre.
Jorge Jellinek, dans la vie critique de cinéma et organisateur de festivals, a vraiment la tête de l’emploi, une tête de Langlois pourrait-on dire. Gros maladroit à grosses lunettes, riche d’histoires qu’il a vécues par procuration sur l’écran de la Cinémathèque, tout va basculer pour lui en un instant qu’on ne racontera pas. Après, celui qui n’était qu’un oiseau de nuits cinématographique aura toutes les audaces, dont une, très hilarante, qui fera de ce taiseux un vertigineux volubile.
Les "anciens" de la Cinémathèque Chaillot retrouveront leurs marques dans cette promenade dans le temple de la cinéphilie uruguayenne. Ils remercieront Federico Veiroj de cette évocation pleine de légèretéd’un mode de vie mort avec la modernité, le DVD et la 3D.
Les autres ne s’ennuieront pas non plus en contemplant ces monomanes inoffensifs comparables à des philatélistes. Ils seront sensibles à cette nostalgie, et même s’ils ne sont pas des aficionadas de la pellicule, trouveront un petit air en commun entre le cinéma de Federico Veiroj et celui d’Aki Kaurismaki, les deux cinéastes partageant un amour semblable pour les petites gens.
Tous les spectateurs conviendront que "La Vida Util" est un exemple rare de film réussi sur le cinéma et sa déraison d’être. Un film singulier à la banalité réjouissante. |