Pour le printemps 2012, le Grand Palais accueille deux expositions centrées sur la beauté mais à destination de deux publics bien différents.
D'une part, l'exposition people pour grandes personnes et adultes avertis à qui sont proposés les fantasmes photographiques de la rétrospective Helmut Newton exaltant la beauté du corps féminin dans le registre du porno chic et du new fetish.
D'autre part, conçue pour favoriser la visite familiale et intergénérationnelle souhaitée par Jean-Luc Cluzel, le Président de la Réunion des musées nationaux-Grand Palais, l'exposition "Beauté animale" qui, tant par son accrochage "abaissé" et ses stickers de silhouettes animales que par son propos, est manifestement dédiée au jeune public.
Bénéficiant d'une belle scénographie à la pétulante palette chromatique de Véronique Dollfus, l'exposition conçue par Emmanuelle Héran, conservateur du patrimoine, directeur scientifique adjoint de la Réunion des musées nationaux, doit être vue, comme l'indique le critique d'art Philippe Dagen*, comme "une exposition bête et gentille".
"Beauté animale" : la cause animale illustrée par des oeuvres d'art
L'exposition est composée de 120 oeuvres d'art dont le sujet est un animal. Et cependant il ne s'agit pas d'une exposition d'art, ni même d'art animalier, bien que s'arcboutant sur la novation introduite à la Renaissance par le naturalisme qui traduit "l’animal dans sa vérité et sa beauté".
En effet, elle est dépourvue de fondement et de cohérence, au moins pour le commun des mortels, tant au regard de l'histoire de l'art qu'à la démarche alléguée par la commissaire.
Ainsi, cette exposition est présentée comme couvrant cinq siècles de peinture, dessin et sculpture animalière, de la Renaissance au 21ème siècle, mais la quasi totalité des oeuvres sont antérieures au 20ème siècle.
Elle est également décrite comme ne présentant que des œuvres créées en Occident et excluant celles des civilisations extraeuropéennes. Or, non seulement elle est quasiment limitée à des oeuvres d'Europe du Nord mais elle inclut le "Caniche" de Jeff Koons.
Par ailleurs, elle exclut la chasse mais le chien de chasse y est représenté ("Deux chiens de chasse liés à une souche" de Bassano).
Elle indique se limiter à la nature "vivante" ce qui justifierait l'absence, par exemple, de "La raie" de Chardin mais la présence de la raie "Ocot" du sculpteur Johan Creten et écarte la stylisation et l'anthropomorphisme et présente "Le Singe peintre" de Decamps, "le Roi des rats" de Katarina Fristch et "Spider" la femme-araignée de Louise Bourgeois
En revanche, avec de surcroît des cartels qui comportent l'indication de l'espèce à laquelle appartient l'animal (et son risque d'extinction au demeurant marginal l'exposition centré sur des mammifères domestiqués), elle constitue d'une exposition de zoologie illustrée soutenant un discours explicite de défense de la cause animale.
A la défense de la cause animale par des images choc, de l'abattage des animaux de boucherie à l'expérimentation animale en passant par la chasse, la tauromachie et les combats d'animaux, Emmanuelle Héran préfère celle de belles images représentatives de la beauté intrinsèque de l'animal en tant qu'être vivant méritant d'être protégé et respecté.
Par ailleurs, le propos, tel qu'analysé ci-dessus, en lisant entre les lignes des titres de ses différentes sections (L'attention à l'animal, Préjugés esthétiques et moraux, Le singe et l'homme, Une nouvelle sensibilité, A la rencontre de l'autre : les animaux exotiques), s'avère un discours sur la tolérance et l'altérité aisément transposable à l'homme.
Alors à chacun de suivre son fil rouge dans "cette merveilleuse ménagerie".
Bestiaire enchanté pour petits et grands et pour découvrir les martinets en mouvement de Giacomo Balla, la chauve souris de Van Gogh et le combat de chats de gouttière de Goya, le crapaud de Picasso et les chevaux de Géricault, les incontournables sculptures de François Pompon et les dessins de Audubon et le "tigre dévorant un gavial" de Antoine Louis Barye. |