N'ayez pas peur, je m'occupe de vous. Monologue dramatique de Nicolas Roux interprété par Salvatore Ingoglia dans une mise en scène de Anouche Setbon.

Sans doute inspiré, comme certains auteurs, tels le dramaturge australien Timothy Daly pour "L'homme dans le plafond", par les cas réels de personnes traquées qui, pour des raisons diverses, avaient été maintenues, par leurs "bienfaiteurs" dans de salvatrices caches secrètes dans l‘ignorance de la fin de la guerre, Nicolas Roux a écrit un monologue tragique qui pousse jusqu'à la folie la compassion dangereuse.

Dans "N’ayez pas peur, je m’occupe de vous", un homme solitaire recueille les quatre membres d'une famille persécutée qui deviennent sa raison de vivre mais également ses otages qu'il ne peut se résoudre à "libérer" à la fin des hostilités.

En scénographiant ce récit dans le cadre d'une banale activité domestique de repassage, Anouche Setbon adopte une mise en scène qui évite de placer le monologue dans le contexte de la confession ou du récit distancié, ce qui immerge immédiatement le spectateur dans une inquiétante étrangeté;

La direction d’acteur est rigoureuse et Salvatore Ingoglia incarne parfaitement, avec en sus sa rondeur pateline et inquiétante, la dérive psychotique sous une apparente banalité.

La Salle d'attente
Comédie de Serge Joncour, mise en scène de Thibault Ameline, avec Henri Courseaux et Jean-Michel Tinivelli.

Ecrivain et scénariste, Serge Joncour se lance dans l'écriture dramaturgique et a compris que deux personnages ordinaires et un lieu tout aussi banal suffisent à élaborer une partition théâtrale.

Ainsi a-t-il mitonné "La Salle d’attente", petit bijou d’humour, parfois noir, registre pour lequel il a déjà été récompensé par le Prix de l'Humour Noir, et de loufoquerie, mettant en présence deux patients dans la salle d'attente d'un médecin en puisant dans le registre du duo de clowns déstructuré décliné à la manière du tandem comique sado-masochiste qui a fait ses preuves au cinéma notamment sous la plume de Francis Veber.

Le premier arrivé, un hypocondriaque, maniaque et paranoiaque, qui a déjà pris possession des lieux tance vertement le second, un malade potentiel et angoissé, qui entre sans sonner et vient polluer son espace vital.

S'ensuit une conversation sous forme d'affrontement à géométrie variable complètement burlesque et farfelu qui navigue entre l'absurde, le burlesque et le saugrenu.

Sous la direction efficace de Thibault Ameline, le duo formé par Henri Courseaux et Jean-Michel Tinivelli fonctionne bien. La silhouette dégingandée et l'air toujours au bord de l'ahurissement du premier suffisent à donner la couleur comique et insolite de la situation et la naïveté effarante du second emporté par le délire ambiant est irrésistible.

Autour de ma pierre, il ne fera pas nuit.
Comédie dramatique de Fabrice Melquiot, mise en scène de Franck Berthier, avec Patrick Palmero, Yvonnick Muller, Julien Leonelli, Aïda Asgharzadeh, Arnaud Dupont et Magali Genoud.

Ni surprise ni prise de risque avec Franck Berthier qui déroge quelque peu au principe du Festival Mises en Capsules qui est de proposer des créations originales de trente minutes, en reprenant un opus d’une valeur sûre, "Autour de ma pierre, il ne fera pas nuit" de Fabrice Melquiot.

Raccourcir de deux tiers la partition originale, et l'amputer d'un personnage, ne va pas sans déperdition tant en ce qui concerne le souffle dramaturgique que le sens. Cela étant, Franck Berthier connaît bien la pièce pour l'avoir déjà montée en 2007 au Vingtième Théâtre et parvient à en esquisser la thématique résumée par son auteur à "Six personnages, chair à vif, cœur dégueulé, se prennent ou s’esquivent".

S’il ne convoque plus sur scène le fantôme d’Elvis tout en reprenant le référent américain avec un guitariste (Yvonnick Muller) se prenant pour Ry Cooder, Tom Waits et Johnny Cash qui, intervenant en live côté jardin, Franck Berthier a fait de nouveau appel à l'excellent Patrick Palmero pour le rôle du père-mère et a réuni une distribution de jeunes comédiens épatants (Arnaud Dupont, Aïda Asgharzadeh, Julien Leonelli et Magali Genoud).

Tu es le père.
Comédie de Jean-Philippe Noël, mise en scène de Simon Hubert, avec Jean-Paul Bordes, Fabienne Chaudat, Matila Malliarakis et François Sienner.

Attention, jeux de mots et même double pour le titre de cette comédie aussi iconoclaste que désopilante qui projette le spectateur dans l'intimité familiale du Panthéon mêlant allègrement figures mythiques et personnages bibliques.

Pour Jean-Philippe Noël, "Tu es le père" ne vise pas tant, pour un Jésus dépressif sous xanax, costume classieux et sandales de marche à lanières, (Jean-Paul Bordes un peu monolithique) à liquider le complexe d'Oedipe qu'à trucider le père.

Dans un salon au confort anglo-saxon des années 60, Zeus, revenu de tout, (Francis Sienner parfait en boss de roman noir) et Vénus, un peu tapée, (Fabienne Chadat pétulante) éclusent sec en s'ennuyant comme des rats morts depuis que la terre a été léguée au rejeton ressuscité ce malgré le dynamisme d'Hermès (Matila Malliarakis sémillant) qui joue le papotin-pigiste-rédacteur en chef du JDD, le Journal des Dieux.

Le spectacle est divertissant mais ne pâtirait pas d'une mise en scène, la première de Simon Hubert, plus débridée.