Textes de Allain Leprest interprétés par Jean-Louis Beydon et Yann Denis.
Quand une reine du disco meurt, un Bee Gees ou une chanteuse anglo-saxonne en perdition dans les drogues ou l’alcool, c’est la "Une" assurée.
Mais quand, dans le même temps, meurt le dernier chaînon de la grande chanson française, les médias se font plutôt discrets.
Et pourtant, c’est la voix rauque et écorchée d’Allain Leprest qu’ils ne faisaient pas beaucoup entendre qui va maintenant prendre son envol pour la postérité.
Et c’est tout le mérite de Yann Denis avec "C’est peut-être... Leprest !" d’être le premier à réveiller ses mots, à montrer à tous combien cette voix qui s’est tue bruit encore.
Que ceux, trop nombreux, qui seront passés à côté de Leprest ne culpabilisent pas : Leprest n’avait pas choisi la facilité de la modernité. Piano-voix, textes dans la lignée des chanteurs dits "Rive Gauche", refus des lalalas et des rengaines que l’on retient dans l’ascenseur, il était fait pour être partagé dans la communion d’une scène plus que dans l’égoïsme d’un Ipod...
Disciple des "3 F" (Ferré, Ferrat, Fanon), il portait comme eux très haut le flambeau des révoltes viscérales, celles des hommes qui aiment les petites gens plus que les puissants, ceux qui refusent et qui, surtout, ne regrettent jamais de n’avoir pas accepté l’inacceptable.
Avec Yann Denis, les amis de Leprest vont se régaler tout autant que les autres, ceux qui auront la "chance" d’entrer dans un univers qu’ils ignoraient et qui va les conquérir en quelques chansons.
Respectueux sans être paralysé par son admiration, Yann Denis interprète Leprest avec bonheur et amitié. Son verbe est fort et sa voix claire, limpide, ne se permet jamais aucun effet facile.
Il est accompagné par Jean-Louis Beydon, qui fut pendant dix ans le pianiste de Leprest et qui a ce beau toucher des grands pianistes qui étaient aux cotés de Brel ou de Ferré, les Gérard Jouannest, les Paul Castanier.
On est ému de le voir tellement heureux de continuer à jouer les mélodies de Romain Didier, d’Yves Duteil, d’Étienne Goupil, Richard Galliano et tous les autres compositeurs si complices de la poésie de Leprest. On est ému de le voir à l’unisson de Yann Denis dans ce spectacle chaleureux qui clame avec talent que la chanson française est toujours bien vivante. Évidemment, à l’heure où les jeunes chanteurs français cessent souvent d’être francophones, c’est un combat, un rude combat.
Yann Denis et Jean-Louis Beydon sont partis sans bleus à l’âme pour le mener. Ils vont le gagner car le public se doit d’être au rendez-vous. C’est peut-être Leprest ? Non ! C’est Leprest ! Absolument Leprest... |