"Agoraphobe et nyctalope, entre fantôme et lycanthrope, une ombre qui rase les murs, s’évanouit au moindre murmure". Chut… Ecoutez, y’a rien à jeter là…"Le jour je squatte les dédales des caves de la cathédrale, quand vous dormez la nuit, je danse, je viens troubler votre silence". Un choix des mots et un sens de la formule qui retiennent l’oreille. "Mycétophage et cataphile, je hante le cœur de la ville et je distille dans ses veines de la peur, de la peine". Un petit fond blues quand le besoin s’en fait sentir et quatre doigts de la main gauche plutôt habiles sur leur banjo nous ravissent. Chanson numéro 3 réussie ! Chapeau !
Pourquoi celle-ci ? Parce qu’elle témoigne bien à sa façon de l’amour de Boule pour les univers fouillés, de son plaisir à jouer avec les mots, et à les confronter à la musique. La poétique est sans concession : du jeu, du sens et du rythme. Quand bien même Boule serait ce cancre, cette "Cervelle de moineau" qui nous raconte ses chagrins d’école, il les aura rattrapés, ses zéros en composition ! Et de la plus belle manière… Chanson 2 réussie ! Chapeau !
Les portraits s’incluent dans des ambiances soignées, rappelant la virtuosité d’un Fersen dans sa capacité à convoquer en quelques mots et quelques notes toute une atmosphère inquiétante, galerie de personnage décalés mais attachants... "Dannie" couturière "de tous les malfoutus", le "Petit-fils de Fantômas" et d’Arsène Lupin, voleur des premières classes, "Le biffin" cherchant dans les poubelles son repas de demain… Chanson 1, 4 et 7 réussies ! Ce n’est plus un chapeau, c’est un haut de forme !
Derrière ces personnages et leur monde associé se cache un petit poil qui gratte sous le col du dimanche. Dans la lignée d’un Sanseverino, on retrouve une pointe d’humour acide, pince sans rire, aux recoins de couplets, une odeur prolo aux détours d’un refrain. Les filles flics sentent la volaille derrière leur collier de perles, les bons élèves finissent piliers de comptoir, les clous pourrissent la vie et nous crucifient aux servitudes quotidiennes, et le monde menace nos enfants de psychothérapie. Ainsi va Boule ! N’oublions pas la tendresse pour ce petit vieux qui pédale dans les étoiles sur son "Vélocipède interstellaire", la "Carte postale à [la] cousine qui habite au bord de la méditerranée" et la très belle patronne… Le tableau est complet, tout le monde est à bord. L’album peut circuler, il a de belles rencontres à proposer.
Beaucoup d’enthousiasme pour ce Boule nouveau, du plaisir à l’écoute, un mariage réussi des mots et de la musique, des ambiances et de la narration, de l’humour et de l’émotion. Bref… Un album réussi ! Chapeau ! |