Comédie dramatique de Mohamed Habassi, mise en scène de Pauline Vallès Moingeon, avec Cédric Tuffier et Pauline Vallès Moingeon.
Gabi est habillé de la combinaison orange des prisonniers de Guantanamo. Il est interrogé par une voix féminine qui n'apparaît que sous forme d'ombre. La révolte est inutile, dans cette zone les droits de Gabi sont niés. Mais est-il vraiment à Guantanomo ou plutôt au purgatoire ?
Le texte de Mohamed Habassi est une variation sur la place des enfants d'immigrés maghrébins dans la société française, citoyens de plein droit qui vivent cependant avec un sentiment de déclassement et doivent quotidiennement faire face à des discriminations.
Le personnage de Gabi diffère de la figure du jeune issu de l'immigration communément décrit dans les oeuvres de fiction, qui adoptent généralement des théories culturalistes (par exemple "La Haine" de Mathieu Kassowitz ou "Entre les murs" de François Bégaudeau), c'est-à-dire qui renvoient la responsabilité des blocages sociaux au comportement des descendants d'immigrés qui serait peu assidus à l'école, en rupture de socialisation, ou repliés sur leur communauté.
Le lieu où se déroule l'action est un symbole supplémentaire du sentiment du protagoniste principal qui malgré une scolarité réussie et un positionnement social meilleur que celui de ses parents continue à rencontrer des difficultés dans l'accès au marché du travail, au logement et un traitement inégalitaire face aux services publics.
La mise en scène de Pauline Vallès Moingeon est sobre sans être austère, le lieu de l'action et le sujet se prêtent en effet peu aux débordements. Quant au jeu de Cédric Tuffier, seul en scène la plupart du temps, il est mesuré, appuyant essentiellement sur les extraits du texte où le personnage fait preuve d'humour et d'autodérision.
Avec une représentation peu habituelle de l'immigré "de deuxième génération", Mohamed Habassi se moque de l'image typique du maghrébin. Celui-ci se revendique de caractéristiques liées à la figure du "beur", et rit sans complexe, même si parfois douloureusement, de ses origines et de son sort.
Cependant c'est peut-être aussi en faisant du personnage de Gabi un contre-stéréotype, donc forcément une innocente victime, que "Le dernier voyage de Gabi", malgré ses passages plus légers, pèche parfois par excès d'angélisme. |