Monologue dramatique écrit et mis en scène par Anne Kellen, interprété par Christophe Allwright.
Parmi la multitude de "seul-en-scène", "A peine un souffle", la pièce d'Anne Kellen, présentée au mythique Théâtre de la Huchette (un demi-siècle d'Ionesco) se distingue par son originalité d'écriture.
Un homme est ficelé sur une chaise. Il est élégant, belle chemise, en soie, bâillon peut-être assorti. Il vitupère contre son ravisseur qui l'observe: voix "hors", qui le torture mentalement.
La voix de la victime, quant à elle, révèle une peur dominée, un mépris pour le bourreau, une audace et un grand cynisme. L'homme est un dominant, un chef, un rouleau compresseur. Il écarte les scrupules des faibles, renvoie les pauvres à leur impuissance et à leur incapacité.
Souvent insoutenable, cette voix démoniaque - Satan pris au filet - provoque, apostrophe, brave le danger.
Le spectateur devient voyeur de cette séquestration, abandonné à cette confrontation et saisit, au milieu des injonctions, l'humanité blessée de l'homme ligoté. Le texte, brillant, intelligent, fonctionne parfaitement, avec une progression troublante.
Christophe Allwright, entravé tout au long du spectacle, yeux bandés, est tout bonnement renversant. On ressent sa rage, on admire son audace, on le déteste et l'on se retrouve en lui, avec effroi. Quel tour de force, quelle puissance d'évocation !
Le bourreau dissimulé...Non, la chute est tellement formidable qu'il faut, naturellement, en laisser la surprise intacte.
Anne Kellen a elle-même assuré la mise en scène de sa pièce, sobrement, avec une efficacité redoutable. A peine peut-on retenir son souffle, fasciné.
A voir d'urgence !