Comédie de Georges Feydeau, mise en scène de Lise Quet, avec Nicolas Fantoli, Cindy Rodrigues, Julien Large, Lionel Rondeau, Damien Prévot, Rémi Dessenoix, Amandine Calsat et Claire Pouderoux.
Il fallait au spectateur braver la neige ce soir-là pour gagner le Théâtre de Belleville et espérer que cette pièce de Feydeau, qui fit les beaux jours de la Comédie Française dans la mise en scène de Jérôme Deschamps il y a peu, serait à la hauteur.
Dès les premières répliques, on sent bien que toute la troupe de la Compagnie Hocemo, révélée en 2007 avec "Le Diable en partage", maîtrise la mécanique si particulière propre au célèbre auteur vaudevillesque, joue à la vitesse adéquate et avec le ton juste.
Dans une belle scénographie de Jérôme Satie, faite de panneaux et de guirlandes dans le style cabaret qui sied parfaitement à l’intérieur de chez Lucette, vedette de café-concert, les comédiens ne ménagent pas leur énergie et offrent avec une belle générosité deux heures de bonheur absolu dans cette pièce où Feydeau une nouvelle fois raille les défauts de ses contemporains.
Tous sont au diapason. De Nicolas Fantoli exceptionnel en Bois d’Enghien qui donne le tempo avec talent à Cindy Rodrigues qui parle avec un phrasé d’époque remarquable et passe par tous les états dans le rôle de Lucette.
Autour d’eux, Amandine Calsat habile en baronne, Claire Pouderoux parfaite en Viviane et Rémi Dessenoix tordant en De Fontanet sont formidables aussi.
Et puis, certains offrent de jubilatoires numéros : Lionel Rondeau passe brillamment du rôle de De Chenneviette à une hilarante Miss Beating avec aisance, Julien Large est un Bouzin qui provoque le rire à chaque apparition et Damien Prévot, phénoménal en Général, s’amuse autant que le public.
Lise Quet, même si on devine dans sa mise en scène l’influence du spectacle de Jérôme Deschamps au Français, propose une version totalement réjouissante du classique où l’action file ininterrompue, et les changements de décor à vue, faits avec intelligence et joie par de petits intermèdes chantés (permettant d’apprécier la belle voix de Cindy Rodrigues) tout à fait délicieux.
Dans cette version intemporelle et "rock’n roll", Lucette chante en anglais et porte des lunettes noires. Etait-il nécessaire de moderniser le contexte de la pièce dont le texte est par ailleurs très daté ?
Il n’en demeure pas moins que la Compagnie Hocemo propose avec "Un fil à la patte" un divertissement de qualité qui remplit toutes ses promesses et qui, comme le dit Julien Large aux saluts, espérant qu’il nous aura "réchauffé l’âme", y parvient complètement, ce qui en ce moment est tout à fait approprié. |