Comédie dramatique d'après la biofiction éponyme de Jean Echenoz, mise en scène de Anne-Marie Lazarini, avec Coco Felgeirolles, Michel Ouimet, Marc Schapira (en alternance Andy Emler) et Yvan Robilliard.
La mode est aux biographies théâtralisées qui permettent de cibler le public passionné par tel ou tel sujet.
On aura droit ainsi à la vie de la sœur ou de la cousine de Claudel, à la tante de Socrate, au frère adultérin de Mozart. Le cinéma n’y échappe pas et l’on sait désormais que le génie d’Alfred dépendait de l’immense sagacité de Madame Hitchcock.
Donc, Ravel. Jean Echenoz s'en est emparé, avec son talent propre, la goujaterie débridée du contemporain qui comprend et devine tout, dévoile, démasque. Ravel est à nous, Ravel est nu.
On le suit, d’un "France" de la Transat, dans les express argentés qui sillonnent l’Amérique du Nord, avec quelques amusantes erreurs géographiques (San-Francisco à Seattle par…Vancouver !) jusqu’à ses démêlés avec le pianiste manchot auquel serait donné le "Concerto pour la main gauche"…
Enfin, le terrible accident d’auto qui allait l’abîmer, malgré quelques bouchères tentatives d’opération du cerveau sur lesquelles Echenoz s’appesantit maladroitement, le génial musicien, dont on ne sait rien en définitive, s’échappe dans la mort, fuyant le vulgaire, les biographes, les chefs d’orchestre sans oreille.
La mise en scène d’Anne-Marie Lazarini est sagace, vive, drôle et ajoute de la vie à ce texte. Un décor de jardin d’enfants amuse l’œil, avec ses couleurs pastel et ses naïvetés.
Des comédiens osent l’incarnation, avec métier et détermination : Michel Ouimet a l’élégance, un joli filet de voix, pour composer un Maurice Ravel sensible, déchiré, vrai et attachant. Coco Felgeirolles et Marc Schapira, narrateurs, commentent, sans vrai rôle à jouer…
Hors du théâtre, exercice de style, évocation d’auteur, personnelle, ce "Ravel" déroute. |