Pour célébrer le 150ème anniversaire de la naissance du peintre et ce, dans le cadre de la seconde édition du Festival Normandie Impressionniste consacrée au thème de l’eau, le Musée des Impressionnismes propose une exposition intitulée "Signac, les couleurs de l’eau".

Loin de n'être qu'une manifestation de circonstance, cette exposition correspond à un propos monstratif reposant sur une réalité factuelle et conceptuelle au regard de l'oeuvre du peintre Paul Signac considéré comme la figure majeure du néo-impressionnisme.

Forte d'une centaine d’oeuvres, dont celles permettant de reconstituer les premières séries néo-impressionnistes exécutées par Paul Signac, elle s'accompagne d'une belle section graphique et d'une présentation des travaux sur la théorie des couleurs.

Signac : il y avait le ciel, le soleil et la mer...

Conçue sous le commissariat de Marina Ferretti, directeur scientifique du Musée des Impressionnismes et responsable des Archives Signac, l'exposition adopte un parcours chrono-thématique calqué sur la récurrence de la thématique de l'élément aquatique, avec l'eau vive et surtout la mer, qui allie la passion personnelle de l'homme et le champ d'expérimentation de l'artiste notamment en terme de recherches chromatiques.

Elle établit également la double filiation de Signac issue de deux rencontres fondatrices : celle de Claude Monet, de vingt ans son aîné, qui décide de sa vocation, et celle de Georges Seurat Signac, son contemporain, précurseur du pointillisme.

Enfin, elle démontre le propos de la commissaire qui conclut que Signac est "foncièrement impressionniste".

Tant par le genre que les thématiques, ceux de la peinture sur le motif de paysage d'eau propice aux études sur la lumière et le mouvement que par la touche à la pâte large et vigoureuse qui caractérisent ses premières toiles (Saint Briac "Les balises", "Le Bechet", "Gare du charbon" - Clichy "Port en Bessin", "La halle aux poissons", "Le catel").

Entre temps, dans le sillage du "chromoluminarisme" prôné par Georges Seurat pour privilégier la sensation lumineuse, son expérimentation pointilliste se traduit par une technique picturale de mosaiste basée sur la juxtaposition de points de couleurs pures mettant en application les travaux sur la théorie scientifique des couleurs

Après les premières séries peintes en bord de Seine à Herblay et aux Andelys, "Brouillard" à Herblay"), celles de bord de mer, telles les plages de Saint-Cast, déclinent les couleurs du paysage selon l’heure du jour.

La technique divisionniste avec peu de matière privilégie la sensation à la pespective et à la profondeur de champ, donnant parfois un rendu d'estampe.

Ses oeuvres de la période 1892-1900, alors qu'il est installé à Saint-Tropez, témoignent d'une touche qui s'élargit et d'une prédilection pour la couleur qui devient éclatante sous le soleil méditérranéen.

Avec le nouveau siècle, grand voyageur et loup de mer dans l'âme, tel que l'a représenté Théo Van Rysselberghe tenant la barre sur son bateau, toile figurant en début d'exposition, Signac peint les grands ports de Marseille à Istanbul et de Venise (trois belle stoiles sur la lagune où il ne résiste pas au plaisir de privilégier le voilier à la fameuse gondole), à Rotterdam en passant par Saint-Malo et Antibes (en petits formats avec un conséquent travail sur le blanc) en se dégageant du strict dogme pointilliste.

Avec une touche plus large et plus nerveuse, il s'octroie une liberté retrouvée patente dans les carnets de voyage avec des aquarelles peintes sur le vif qui lui serviront d'étude pour les oeuvres peintes en atelier.

Une liberté qui trouve son point d'orgue dans ses oeuvres tardives aux polychromies rythmées aux portes du fauvisme (Matisse fut son élève) dans lesquelles le mouvement efface la staticité contemplative et explose la couleur.

Une exposition à ne pas rater d'autant qu'elle s'inscrit dans le cadre enchanteur de Giverny propice aux escapades printanières et estivales.