Alex Garrett veut travailler dans la finance, comme feu son père. Dans une des sociétés de courtage les plus en vue de Wall Street, elle va se battre pour monter les échelons dans le milieu fermé et machiste de la finance. Alors que son tempérament et sa volonté l'amènent enfin au rang d'expert, voici qu'elle tombe amoureux d'un collègue. Une jeune femme, une histoire d'amour, New York... Damned ! De la Chick Lit (ou de la Lick Shit si vous êtes amateur de contrepétrie).
La description du milieu de la finance, moins glamour que celui de la mode (Confessions d'une accro du shopping, Le diable s'habille en Prada...) peut-il sauver Tradeuse du sort qu'on réserve traditionnellement à cette littérature de hall de gare ?
La réponse est clairement non. Certes, l'héroïne doit se montrer plus cynique qu'une Bridget Jones, mais Gordon Gekko prenait les traits de Michael Douglas dans Wall Street d'Oliver Stone en 1987 déjà et Patrick Bateman est apparu dans American Psycho de Brett Easton Ellis dès 1991, il y a plus de vingt ans. Durant ces deux décennies, les holding financières se sont lancées à corps perdu sur le marché des produits dérivés, qui a débouché sur la crise des subprimes. Le personnage du trader assassin Patrick Bateman a été rejoint au panthéon des méchants financiers par des personnages réels Bernard Madoff, les dirigeants de Goldman Sachs ou Jamie Dimon de JP Morgan, Too Big To Fail.
En 2013, Erin Duffy nous narre les aventures d'Alex Garrett qui est tellement garce qu'elle ne répond pas aux SMS de son ex-boyfriend, qu'elle se réveille pour aller au boulot après avoir picolé toute la nuit, qu'elle drague ouvertement les cuistots dans le bars et dépense 6.000 $ en cours de cuisine. Et même qu'elle dit des gros mots : "La salope du bureau ? a proposé Liv. La pouuuffiasssse (sic) du service ? a renchéri Annie". "Allo, quoi ?" a-t-on envie de répliquer.
Le style d'écriture est rapide, certainement pour que la lectrice lambda à laquelle est destiné ce produit, pardon ce livre, se rappelle du début lorsqu'elle arrive enfin au point en bout de phrase. "Est-ce que c'est une urgence ? Bon, tant mieux. Dans ce cas, je promets que dès qu'il revient au bureau, je lui dis de vous rappeler. Mais de rien, je vous en prie. Clic." On s'étonne de ne pas trouver de pages de pubs entre les feuilles du livre, mais heureusement il y reste le placement produits : "J'allais regarder le Week-end Update dans Saturday Night Live", "On a dîné chez Nobu" (chaîne de restaurants japonais), "Vous avez déposé votre liste de mariage chez Crate & Barrell ?".
En somme, ce livre vous en apprendra autant sur la bourse que Wall Street : l'argent ne dort jamais, le retour malheureux de Gordon Gekko. Les aventures d'Alex Garrett sont moins drôles que celles de Bridget Jones et moins glamour que celles de Carrie Bradshaw.
Si Patrick Bateman traîne encore du côté de Manhattan, on lui livrera volontiers Alex Garrett. |