Comédie dramatique de Jean Verdun, mise en scène de Jean-Michel Martial, avec Karine Pédurand et Jean-Michel Martial.

Pièce de Jean Verdun initialement intitulée "Mieux que nos pères" avant d'être rebaptisée "Tibi's Law" pour son adaptation américaine, puis ghanéenne, "La loi de Tibi" est enfin montée en France, dans une version raccourcie, grâce à l'enthousiasme de Jean-Michel Martial, à la fois comédien et metteur en scène, séduit par l'écriture et le propos profondément humaniste de l'auteur.

Tibi est un roman à lui tout seul, un personnage, un mystère. Après avoir vécu et enseigné en France, ciré les pompes et lavé les carreaux des puissants aux États-Unis, il retourne dans son Afrique natale pour devenir ce qu'il a toujours été destiné à être : diseur, et maître de cérémonie.

Il officie lors des enterrements et sait si bien faire rire et pleurer les foules que des tours opérateurs se sont intéressés à son talent et inscrivent ses interventions à leur programme.

Le spectateur, transformé le temps d'une pièce en touriste ayant payé l'offrande pour assister au show de Tibi, est amené à s'interroger en permanence sur sa présence et se retrouve face à ses propres contradictions, entre voyeurisme et passivité, mais toujours entouré de la bienveillance du diseur qui jamais ne l'accuse.

Dans un savant mélange de compassion, d'humour noir et d'ironie mordante, Tibi, par l'intermédiaire de la plume de Jean Verdun, au rythme et à la poésie enchanteresse, assène ses vérités, sans ménagement, sur l'Homme et l'ordre du monde. Il dénonce la misère mondialisée comme assise de nos sociétés où l'avoir, le pouvoir, l'avidité et le profit sont érigés comme valeur.

Tel un conteur des temps modernes qui distillerait la sagesse millénaire accumulée par les générations antérieures via la paroles et les histoires, Tibi raconte. Il parle de sa vie, du monde, de l'homme, chanté, pleuré, questionné, et de la loi universelle qu'il a découverte, à l'égale d'un Newton ou d'un Archimède, fortuitement, par l'expérience de la vie : La loi de Tibi.

Si Tibi est un clown, un comédien, un ancien éditorialiste, il ne cherche ni à divertir ni à culpabiliser. Sa parole est un constat, une vérité sans fioriture, seule capable d'élever les hommes hors de leur cloaque et de tendre des ponts entre les êtres.

Jean-Michel Martial, incarne Tibi de manière magistrale. Avec sa voix grave, envoutante, et son phrasé impeccable, il trouve le rythme juste des mots de Jean Verdun, en en recréant le halo poétique et mystérieux.

Karine Pédurand, dans le rôle moins expansif de Mara arrive tout de même à briller en dépit de son partenaire qui illumine toute la scène de sa présence. La scène du bain de Mara est d'une beauté poétique et sensuelle saisissante. Le plateau est nu, le décor de briques et de brocs, à l'image des possessions de Tibi et Mara. La parole et les hommes seuls, comptent.

A la fois conte philosophie et pamphlet politique, "La loi de Tibi" est avant tout une invitation au réveil et à la prise de conscience individuelle et collective dans une de ses plus belle forme : celle qui chérit à la fois les hommes et les mots, leur pouvoir, leur magie, leur aura.