Alors que les jours s’assombrissent sous nos latitudes, Son Lux (fils de la lumière / luminosité) dans son monde bien à lui se goberge de lumière. Pas radin pour un sou, l’homme nous illumine à notre tour avec son troisième opus, le bien titré, Lanterns.
Déjà entendu aux côtés de Sufjan Stevens et de Serengeti dans la formation S/S/S, Son Lux livre ici une pièce à l’orchestration grandiose et dès la pochette (écrin ?) de celle-ci, se fend d’une leçon de vie, aux allures de vérités universelles : quand il y a lumière, il y a aussi une part d’ombre.
Une éclipse donc, qui tout à la fois symbolise les deux faces d’une même pièce sur laquelle cohabitent les lourdeurs mécaniques de la musique électronique et les légères envolées mélodiques d’un piano ou d’une harmonie vocale. Le tout se retrouve solidement ficelé dans un ensemble magistral par la voix si particulière du musicien. Chargée d’un pathos puissant et d’une passion qui vient l’(la) (sur) animer par soubresaut, elle s’impose comme un fil d’Ariane pour se repérer dans le méandre des productions alternant entre le spectaculaire et l’introspection.
Impossible d’ignorer ce double dynamisme avec des titres comme "Alternate World" ou "Enough of Our Machines" où poésie s’oppose à des constructions altérant la logique musicale avec doigté et finesse qui n’hésite pas à dérober, ici et là des sons pour offrir au rendu final une architecture s’appuyant sur des vides et des blancs ("Plan The Escape"). Et bien évidemment, le tout se retrouve entretisser sur une trame électronique éthérée, présente en filigrane, presque de façon anecdotique.
Plus papable, l’intimisme suggéré par Son Lux lors de son chant est renforcé par une collection de voix s’inspirant clairement de certaines pratiques liturgiques et renforçant ainsi un effet de profondeur à l’album. Pour autant, Lanterns, c’est aussi des productions qu’on ne peut limiter à un seul genre, comme le souligne le duo clap/cuivre sur le titre "Easy" portant l’opus du côté des milieux indie R’n’B, dans la veine de Autre Ne Veut. Ou "No Crimes", rencontre fortuite entre le folk rock et les délires les plus ludiques de Animal Collective.
Mais la véritable beauté de cet opus réside en quasi-totalité dans les fantaisies du musicien qui, non content d’évoquer tout un monde, s’impose à la tête d’une symphonie à deux niveaux de lecture. Le premier confine à l’euphorie, voire à la sensualité du jeu des voix. Le second plus sombre et moins léger, un concerto électronique entre orchestration spectaculaire et production de brio. |