En alignant les noms de Grimes, Majical Cloudz, Mozart’s Sister ou de Blue Hawaii, le duo de Solar Year ne faisait pas une simple liste de name dropping, prête à remiser l’American Psycho de Bret Easton Ellis au grenier !
C’est tout le contraire même, puisque le premier album de David Ertel et de Ben Borden, Waverly, fut originellement autoproduit et sorti en 2012, dans l’indifférence la plus totale. Pourtant, on l’a bien compris, le duo connaît du beau monde, dont le centre de gravité se personnifie - encore une fois - autour d’Arbutus Records, à Montréal donc.
Et comme toute la joyeuse troupe mentionnée plus haut, Solar Year se fait fort de revisiter la musique actuelle en alliant le traditionnel à la nouveauté. Autrement dit, à la technologie.
Ou tout du moins, une idée de celle-ci qui s’inscrit à des lieux de "l’électro-dance-music" et qui ne s’articule pas sur une trame rythmique propre à secouer les clubs. A la réalité, on est ici en présence d’un son tout autant contemplatif qu’expérimental, stylistiquement proche d’un Panda Bear sous acide et touché par un moment de grâce spirituel.
Aucun doute à ce sujet quand on entend pour la première fois les chants évanescents (voire même évasifs) d’Ertel et les boucles sonores de Borden. Cette combinaison leur permettant ainsi, de réactualiser les chants liturgiques et les augmenter, au passage, de boucle sonore aux réfractions déformées par la technologie.
A l’exception de quelques pistes, comme "Night & Day", les percussions ne sont que d’une discrète présence, offrant un espace propice aux enchaînements mélodieux mystiques et aux reflux presque tribaux de Borden.
Ailleurs et par intermittence, le chant comme les basses s’alourdiront pour contraster cet album aux allures grandioses et légères. Sur "Brotherhood" réenregistré avec un renfort de Grimes, cela ajoutera une profondeur bienvenue qui s’accordera avec brio aux flottements de la voix d’Ertel. Le titre "Pivot", quant à lui, charmera avec une ligne de basse aussi épaisse qu’imparable. Le rendu final, propulsant le duo en dehors des cathédrales dans lesquelles on l’aurait imaginé en écoutant "Cardinal Point".
Car n’oublions pas que si l’album fut (comme souvent avec la scène de Montréal) enregistré dans une chambre, le duo livre ici une pièce prête à s’essayer et à s’adapter à toute sorte de lieux. En est témoin l’expérience qu’ils ont menée dans une piscine (Solar Year + Waverly, sur Youtube) et les dimensions que revêtent des titres comme "Seeing The Same" ou "Global Girlfriend", dont la morphologie semble bien plus à même de se tourner vers la nature et les grands espaces plutôt que les salles de concerts.
S’il a fallu deux dates de sortie à cet album pour se faire entendre, nul doute que le duo et sa musique si particulière devraient enfin pouvoir atteindre les oreilles à travers le globe, puisque porteur du renouveau caractéristique à Montréal. Le tout, en s’alignant comme les héritiers d’une musique électronique plus cérébrale et décomplexée (merci The Knife), propre à jeter des ponts entre les genres, les époques et les lieux. |