Il y a un an jour pour jour sortait Regarde Le Ciel, le premier album d’Aline. Un album qui proposait une musique pop mélodique et soignée. Le groupe a rencontré un succès critique et public amplement mérité, et s’est inscrit comme un des fers de lance de cette nouvelle scène pop française. Rencontre avec Romain Guerret, chanteur et guitariste du groupe.
Une année est passée depuis la sortie de Regarde le Ciel. Une année que j'imagine riche en émotions. Quel regard portes-tu sur cette année écoulée ?
Romain Guerret : Avec le recul on peut dire que 2013 fut une année tourbillonnante, une année exténuante aussi. On a beaucoup appris sur le milieu de la musique, sur la scène, sur nous-même, sur la France et son réseau autoroutier. On croisait beaucoup de gens sur la route et partageait de très bons moments avec d'autres groupes, le public. Des amitiés se sont créées, on a aussi pas mal progressé.
L’imaginais-tu ainsi ?
Romain Guerret : Non. On avait au fond de nous l'espoir que les choses se passent bien mais comme depuis le début, ça a toujours été assez compliqué pour Aline, on ne se faisait pas trop d'illusion. On profite de ce qu'il y a de bon à prendre, rien n'est acquis, on vit les choses au jour le jour avec, pour seule ambition, de ne pas mourir trop vite.
Avec le recul, si tu avais des choses à changer sur le disque...
Romain Guerret : C'est très compliqué d'être objectif avec son propre travail. Raisonnablement, je ne dirais pas grand chose en fait... Il est le reflet exact de mon état d'esprit d'il y a trois ou quatre ans. C'est un premier album qui est une synthèse entre Young Michelin et Aline, un passage. Personnellement, je n'écoute pas ce que j'ai fait par le passé, ou très rarement ou par hasard. Donc Regarde le ciel n'échappe pas à la règle. Si je l'écoute, je vais lui trouver plein de défauts et déprimer. En tout cas, il gardera toujours une place à part dans mon cœur. C'est la chose qu'on a faite qui a le plus "marché" et il sera à jamais chargé de souvenirs, bons et mauvais, car sa genèse correspond à une période difficile pour moi et sa sortie et son exploitation à une période d'excitation et de nouveauté comme une renaissance.
Pour le prochain album, je me suis juré de composer des morceaux dans ma tonalité !
Vous avez pas mal tourné. Quels sont tes meilleurs souvenirs ? Les pires ?
Romain Guerret : Oui nous avons fait une petite centaine de concerts avec Aline. Nos meilleurs souvenirs sont, je pense, et là je parle pour tout le monde, liés au fait même de tourner. Il y a bien évidemment des anecdotes précises qui resteront mais ce qu'il en reste ce sont des impressions, des ambiances, des atmosphères, des décors, des lumières et des paysages, une poésie du déplacement et malgré la petite pression que les concerts engendrent un certain lâché prise. Une sorte de "dérive" raisonnée. Sillonner la France, un territoire, en camion en compagnie de gens que l'on apprécie pour aller donner des concerts, c'est assez magique quand c'est la première fois et que l'on n'est pas blasés. J'ai pu dresser une espèce d'état des lieux d'un pays et d'une population à une période donnée, établir des comparaisons, noter des différences. Si j'ai pu déplorer une certaine uniformisation, des décors urbains et des modes de vie (du style vestimentaire, du champ lexical), j'ai aussi pu constater avec plaisir qu'il y avait encore et malgré tout des spécificités liées aux régions, aux histoires des villes, aux individus. Je n'aime rien tant que de voir défiler des paysages en écoutant de la musique. Une douce rêverie à l'exact opposé des pseudo-poses rock'roll en vigueur dans ce milieu parfois débilitant.
Les mauvais souvenirs s’il y en a sont dus à quelques concerts médiocres qui plombent un peu l'ambiance des lendemains.
A postériori que penses-tu de l’émergence de cette nouvelle scène pop française ?
Romain Guerret : J'espère qu'elle ne va pas s'éteindre trop vite et souhaite qu'elle puisse dépasser l'excitation d'une saison en prenant un peu de profondeur. Il y a très longtemps qu'un tel phénomène ne s'était pas produit en France donc je pense qu'il a sa raison d'être. Il fallait que ça arrive et n'en déplaise aux trolls de tout poil cette scène, cette "première vague" car une deuxième arrive avant peut-être une troisième, a vu le jour de façon tout à fait spontanée, sans calcul.
Certains vont disparaître, d'autres muter, d'autres s'installer sur la longueur. En tout cas, je souhaite à tous ceux dont on a croisé la route ces deux dernières années de continuer le plus longtemps possible à composer et jouer sans se poser trop de question.
Vous êtes rentrés il y a quelques jours en studio. Peux-tu m'en dire un peu plus ? Quelle couleur a les nouvelles compos ?
Romain Guerret : On est allé enregistrer des maquettes, 6 morceaux à Valence dans le studio que nous ont gentiment prêté les musiciens du groupe Dionysos. Pour l'instant, je ne peux pas te dire grand chose, ces démos constituent une base de travail, on a essayé différentes directions, quasiment une par titre pour voir ce que pouvait donner Aline dans des tempos, des couleurs, des ambiances différentes. Il y a du pure Aline, pop, lumineux et direct, des choses plus "dansables", chez Aline ce mot prend un sens assez particulier je dois dire, bref on a une toile blanche et on essaie des nouvelles huiles. En tout cas, on garde l'essence de notre son, pas de production tape-à-l'œil à la mode, pas d'arrangement bling bling, toujours ce souci d'épurer. Peut-être une place plus grande aux nappes de synthés dans le mix et une touche d'électronique raisonnée ? A voir. Un jour à force de légèreté et d'épure, ça va finir par un album complètement blanc et silencieux avec juste une phrase répétée en boucle en infrason.
Ces maquettes ont été écrites sur la route ?
Romain Guerret : Non, sur la route on écrit des recueils de blagues et d'aphorismes.
Une sortie est-elle envisageable en 2014 ?
Romain Guerret : Une sortie d'un ou plusieurs EP, des collaborations, des split singles, oui je l'espère mais de l'album non ! Tout est tellement long, il règne dans cette industrie une telle inertie, c'est déprimant. On aimerait bien aussi sortir un disque de face B et d'inédits, je ne sais pas où ni avec qui ni comment mais ça nous botte vraiment en attendant la sortie du deuxième album.
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