Spectacle conçu et mis en scène par Jean-François Peyret d'après le roman de Henry David Thoreau, avec Clara Chabalier, Jos Houben, Victor Lenoble et Lyn Thibault accompagnés au piano en alternance par Alexandros Markeas ou Alvise Sinivia.
"Re : Walden" est une proposition de Jean-François Peyret. Le metteur en scène s’attache à créer des passerelles entre la réflexion philosophique et scientifique et l’expression théâtrale.
Après Montaigne, Darwin, Galilée, il opère un retour sur une lecture de jeunesse : l’expérience de Henry David Thoreau qui se retranche deux ans dans une cabane auprès d’un lac dont il donnera le nom à l‘essai paru en 1854 Walden.
En intitulant le spectacle "Re : Walden", Jean-François Peyret crée un faisceau de significations. Re : comme le retour à l’essai du penseur américain lu dans le passé, (retour) à des sentiments adolescents, (retour) à la nature et à l’intériorité, qui reste à explorer telle une terra incognita. "Re : Walden" fait également écho au langage informatique comme s’il s’agissait d’ une réponse à un courriel qui a pour pour objet Walden.
Thoreau est resté en mémoire pour son ouvrage "De la désobéissance civile" publié en 1849. "Walden" est moins connu. Il y livre les pensées que le retour à une vie sans artifices lui évoque. Enclin à croire que la vie dépend de la technologie, des sciences, des structures sociales, est-il possible de refuser la modernité et revenir à une vie simple ?
En questionnant la nature, l’arbre, le lac, Thoreau relie l’homme au Cosmos, à la Création. D’abord se dépouiller de ses habitudes de pensée, de ses contraintes pour ne considérer que ses besoins vitaux. Alors c’est tout un monde changeant et riche qu’il peut enfin voir, c’est avec lui-même qu’il organise un commerce fécond.
Le travail théâtral a progressé par étapes : une version installation de 2010, une exposition de 2013, versions théâtrales successives de 2010- 2011, la création au festival d’Avignon de 2013.
Les quatre comédiens Clara Chabalier, Jos Houben, Victor Lenoble et Lyn Thibault évoluent dans la matière du texte, matière retorse, traduit de l’américain. Le retour au texte et aux souvenirs d’enfance est une parole hésitante, interrompue, sur laquelle se superpose l’anglais du texte original, plus musical.
La densité du texte ou la profusion des signes technologiques viennent, en quelque sorte, paralyser le jeu : les comédiens dépossédés de leurs corps comme la modernité crée des gens désincarnés.
Les essais pour domestiquer le texte de Thoreau, de le comprendre, de l’incarner se doublent d’une partition de musique expérimentale d’Alexandros Markeas, à partir de deux pianos : passionnante en elle-même. Nous serons plus réservés sur l’illustration vidéo qui débute de façon poétique avec des photos de la nature au fil des saisons, pour se transformer en un balayage confus de textes puis de personnages de synthèse.
La mise en scène qui force le trait en s’appuyant sur une surenchère technologique crée la saturation et une forme d’impatience. De là à voir presque un contresens. Car suivant la démonstration de Thoreau, derrière des moyens sommaires se cache une vraie richesse ou selon la formule célèbre "The Less is More". |