Spectacle-performance écrit et interprété par Carole Thibaut.
En tant qu'artiste-femme et artiste-féministe, "statuts" qu'elle revendique tout en ayant pris la mesure de la dimension péjorative et ostracisante qu'ils induisent chez certains, Carole Thibaut ponctue son trajet de comédienne, metteuse en scène et auteure, d'un spectacle-performance en solo qui explore la représentation de la figure féminine.
Depuis 2008, elle peaufine et interprète "Fantaisie(s)", sous-titré "L'idéal féminin n'est plus ce qu'il était", dont elle présente en 2014 la quatrième version avec des fondamentaux intangibles et qui se s'enrichit en fonction de l'actualité.
Elle y interroge, et surtout, dynamite, les représentations du féminin, qu'elles soient historiques, sociales et/ou culturelles, et, en premier lieu les diktats esthétiques relatifs à la femme idéale.
Car l'idéal féminin est une construction phallocratique particulièrement insidieuse qui alimente la mécanique d’oppression et de domination de la femme. Conçu comme un but ultime, il nécessite impérativement la beauté physique mais "pas que", à laquelle doivent s'adjoindre nombre de qualités et aptitudes complémentaires, comme la culture et l'intelligence mais "pas trop". Et donc, s'il y a peu d'élues, il y a beaucoup d'appelées qui passent au laminoir.
La sexuation sociétale, l'instint maternel, le phallocentrisme et le sexisme exacerbé sont au coeur d'une partition intelligente qui mêle l'humour et la dérision à la tragi-comédie et au drame.
Par ailleurs, l'opus soigneusement élaboré revêt une double spécificité qui renouvelle l'exercice notamment en s'écartant tant du théâtre documentaire que de la diatribe profératoire.
D'une part, sur le fond, évolutif et réflexif, elle ne tend pas à véhiculer un message ou ériger un contre-dogme universel puisque Carole Thibaut précise et assume sa "subjectivité" en indiquant qu'il résulte de ses expériences personnelles et intimes.
D'autre part, en la forme, nonobstant la permanence de l'axe dramaturgique et de la scénographie, le spectacle est modulaire et à géométrie variable. Chaque variation est traitée différemment selon un registre scénique différent, du jeu théâtral avec la scène burlesque de la mère indigne au chant avec l'infâme rap incitant à l'injure et à la violence envers les femmes.
Ce qui implique un conséquent travail scénographique réalisé avec la collaboration de Didier Brun pour les lumières et de Pascal Bricard pour l'univers sonore avec un plateau divisé en quatre espaces scéniques : à jardin un pupitre de conférencier, à cour une table de maquillage, au centre un catwalk avec en fond de scène un miroir paravent à trois volets qui permet, outre les effets miroir, de circonscrire le contexte perverse tout en y insérant une dimension fantasmagorique.
Tout est prêt. L'idéal féminin peut entrer en scène Comédienne investie et engagée, Carole Thibaut lui donne corps pour mieux l'investir. Une performance subtile.