En découvrant le single "The Knife" de Kyla La Grange en avril dernier, on devinait vite un changement majeur dans la pop - jadis - lisse de l'artiste. Le titre lançant des arabesques sonores électroniques par-dessus une voix sucrée mais passionnée, trahissait un exercice rappelant fortuitement les expériences du duo de The Knife.
Entre ambiance caribéenne et électronique lounge, Kyla mettait subtilement en place une pop dépaysante. Sans être originale, la démarche n'en reste pas moins tout aussi salutaire que rafraîchissante, d'autant plus que la chanteuse n'hésite pas à surprendre son monde en faisant appel à un véritable arsenal sonique varié.
De fait, Cut Your Teeth n'a eu cesse de dévoiler une féerie dont la typologie s'attarde largement autour d'une électronique débarrassée de toute lourdeur. A la place, on retrouve une poésie alambiquée et flottant subtilement vers des paysages roses et ensoleillés. C'est que Cut Your Teeth est un album pop, faisant largement appel à un bestiaire sonore varié.
Têtes de gondoles évidentes, les titres "Knife" et "Cut Your Teeth" tracent le sillon, devenu chaudron dans lequel la décoction alchimique de Kyla prend toute son ampleur.
Restreignant volontairement son organe une majeure partie du temps, telle une sirène ensorcelante, l'artiste réussit à conjurer des atmosphères romantiques et secrètes, avant de finir par briser le calme apparent, rafiot sans défense, à l'aide des vagues soulevées par sa voix lors des refrains.
Circée au visage angélique, La Grange dessine ici son propre mythe : un algorithme entêtant, partagé entre rythmes sensuels et légèreté pop. Seule maîtresse à la barre, l'artiste explore tout un univers construit d'exotisme et de luxuriance. Douanier Rousseau à ses heures, sa naïveté n'est ici que légèreté rafraîchissante, marquant Cut Your Teeth comme un album propice à adoucir les longues nuits d'été.