Réalisé par Amor Hakkar. France/Algérie. Comédie dramatique. 1h35 (Sortie le 23 juillet 2014). Avec Nabil Asli, Anya Louanchi, Zineb Ahmidou et Ritage Saouli.
En lisant le résumé de son synopsis, on pouvait tout redouter d'un film qui traitait d'un "sujet de société difficile" : la stérilité d'un jeune homme algérien.
Dans son précédent film, "Quelques jours de répit", dont on avait vanté la justesse, Amor Hakkar trouvait un angle imprévu pour éviter d'aborder de manière routinière le problème des sans-papiers.
Dans "La Preuve", pareillement, il ne s'embarque pas dans un récit "sociologique" qui décrirait cliniquement comment Ali va vivre la découverte de son impossibilité d'être père. Il préfère, grâce à une astuce de scénario assez brillante, prendre un chemin de traverse et passer par une fausse "intrigue policière".
Si l'on compatît aux affres d'Ali, chauffeur de taxi sympathique, dont le bonheur s'écroule avec un petit papier rose qui lui confirme la piètre qualité de son sperme, on découvre surtout une société algérienne où l'on ne se parle pas assez et qui pourrait aller mieux s'il n'y avait pas des impératifs moraux archaïques à satisfaire rôdant au-dessus des têtes de ses habitants.
Le film d'Amor Hakkar a quelque chose à voir dans sa facture avec un certain cinéma iranien, tel celui d'Abbas Kiarostami à l'époque où il aimait filmer les gens "populaires", les saisir dans des discussions pas forcément d'un énorme intérêt mais toujours criantes de vérité.
Amor Hakkar sait aussi donner beaucoup de fluidité au récit en filmant les courses d'Ali, traversant mutique villes et campagnes, en écoutant la radio ou les propos de ses passagers.
Peu à peu, tout devient plus sombre, plus tendu, même les parcours du taxi d'Ali prennent un tour plus labyrinthiques. Le bonheur d'Ali avec Houria, jeune veuve qu'il a épousé avec deux fillettes qu'il aime comme ses filles, est obligatoirement soumis à l'aveu "terrible" qu'il doit faire... ou ne pas faire.
Nabil Asli incarne Ali avec une grande pudeur et tient le film jusqu'au bout. On ne racontera pas la fin qu'il a choisi de vivre, mais "La Preuve" d'Amor Hakkar, œuvre sensible qui dresse un portrait plus apaisé que d'ordinaire de l'Algérie, est un film qui touchera au plus profond beaucoup de spectateurs. |