Il y a tant de merveilleuses choses à louer dans ce disque. L’élégance des arrangements de Riccardo Del Fra, la virtuosité des musiciens…
Reprendre la musique de Chet Baker n’est pas quelque chose de facile, beaucoup s’y sont cassés les dents auparavant. Riccardo Del Fra s’en sort avec une élégance rare, allant au-delà de la révérence au maître ou du simple hommage à l’ami, nous donnant à entendre la quintessence de la musique de celui avec qui il a partagé la route, la scène, la vie pendant une bonne dizaine d’années.
On retrouve donc toute la puissance, toute l’intensité, la folie que le trompettiste, mi ange-mi démon, injectait dans la moindre de ses notes. Mais le talent de Del Fra se trouve dans sa façon d’éviter les clichés, d’être capable de redonner une nouvelle / autre vie à cette musique en retravaillant les formes (les suites "Love For Sale / Wayne’s whistle" ou "But Not For Me / Oklahoma Kid"), de laisser une place importante à l’improvisation et aux jeux des musiciens, aux surprises, de donner des couleurs veloutées, poétiques à l’orchestre et de mixer standards avec compositions personnelles.
C’est aussi de s’entourer de musiciens exceptionnels : la frénésie du saxophoniste Pierrick Pédron, l’incroyable touché du batteur Billy Hart, le magnifique Bruno Ruder au piano, Airelle Besson à la trompette, l’orchestre Deutches Filmorchester Babelsberg, et lui-même à la contrebasse. Le choix d’Airelle Besson sonne comme une évidence tellement la jeune trompettiste française possède un jeu plein d‘émotion, tout en douce rondeur, en expressivité toute féminine. Une véritable distinction, un raffinement se dégage de cette musique presque romantique, fragile, se situant entre modernité et tradition. Alors on vibre à l’unisson de Del Fra, à l’unisson de ses notes qui s’envolent comme des volutes bleues.
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