Réalisé par Asaf Korman. Israël. Drame. 1h40 (Sortie le 4 mars 2015). Avec Liron Ben-Shlush, Dana Ivgy, Yaakov Zada Danie, Carmit Mesilati-Kaplan et Varda Ben Hur.
Comme tous les grands huis clos cinématographiques, "Chelli" d'Asaf Korman ne s'embarrasse pas avec la frontière sacro-sainte entre théâtre et cinéma. Il n'a pas davantage cure de la limite à ne pas franchir quand est filmée sur toutes les coutures une handicapée mentale.
Car ce nouvel avatar du cinéma israélien s'attache à décrire la vie fusionnelle entre deux sœurs seules au monde et n'a pour objectif que de filmer cet amour hors normes dans lequel Gabby sacrifie sa vie pour s'occuper de sa sœur Chelli.
Pour son premier film, Asaf Korman n'a pas choisi la facilité en peignant cet amour plein de plaies au cœur et de blessures à l'âme. Le portrait de Gabby, sœur courage, répond en émotion à celui de Chelli, sœur blessée, dont la souffrance affleure à chaque instant.
Gabby, c'est Liron Ben Shlush, par ailleurs scénariste et épouse du réalisateur, qui s'est inspirée de sa propre histoire pour bâtir les personnages des deux sœurs. Chelli, c'est Dana Ivgy - que ceux qui ignorent quelle grande actrice elle est - penseront réellement handicapée tant sa prestation semble naturelle.
"Chelli" raconte le moment où leur fusion est mise à l'épreuve par l'irruption de Yaakov Daniel Zada, qui joue Zohar le petit ami de Gabby et qui a la désastreuse idée de vouloir vivre avec elle, ou plutôt avec elles.
Il n'en résultera qu'un quiproquo sexuel à la mesure de l'intense fusion des deux sœurs, à la mesure de cette grande histoire d'amour qui prend aux tripes grâce à la qualité exceptionnelle de ses deux interprètes.
Dans sa mise en scène jamais froidement naturaliste, Asaf Korman n'a pas hésité à montrer la proximité de ses deux corps si différents, si antagoniques qui se rejoignent souvent, comme dans une magnifique scène dans une baignoire, pour former une douce et inattendue harmonie.
Car, si "Chelli" d'Asaf Korman pourrait facilement fournir un argument théâtral très fort, il n'a rien à voir avec du "théâtre filmé". C'est un beau film, simple et juste.
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