Dans le cadre de l'Année France-Corée, le Musée national des arts asiatiques-Guimet présente un inédit florilège de sa collection de peintures coréennes anciennes sous le . "Tigres de papier, cinq siècles de peinture en Corée".
Placée sous le symbole du tigre qui renvoie aux mythes fondateurs du peuple coréen, l'exposition propose une immersion dans l'art pictural coréen ancien tel qu'il s'est constitué et développé sous le règne de la dynastie Choson.
Ce règne correspond à la période historique d'indépendance et d'unité de la Corée entre deux invasions et antérieure à sa partition politique, de la fin du 14ème siècle, avec la victoire du général Yi Songgye, fondateur de cette dynastie, qui met fin à la domination mongole, à l'annexion japonaise au début du 20ème siècle.
Elaborée sous le commissariat de Sophie Makariou et Pierre Cambon, respectivement présidente du MNAAG et conservateur de la section Corée dudit musée, elle présente, dans une scénographie lumineuse et colorée, une sélection d'estampes murales sur papier et de peintures sur soie apposées sur paravents ainsi que des objets d'art et des pièces de mobilier.
Les Tigres de papier du Pays du matin calme
Les commissaires ont opté pour un parcours chronologique qui relate la constitution d'un art pictural national à partir d'une sensibilité naturaliste et d'une esthétique minimaliste et de son évolution du réalisme symbolique au naturalisme puis à l'ornementalisme.
Sa particularité tient à ce qu'il s'est érigé comme un art de lettrés qui aspirent à la fondation d'un royaume idéal placé sous l'obédience des préceptes très codifiés du confucianisme, au rang desquels la beauté spirituelle et l'harmonie immanente dont la traduction picturale n'avait pas vocation décorative ou ornementale.
Outre la célébration de ces préceptes, comme le paravent représentant les huit vertus du confucianisme ou ceux qui représentent les insignes de l'érudit, le confucianisme a conduit à l'élaboration d'un répertoire thématique essentiellement symbolique traité en épure avec la simplicité de la ligne et l'élégance du trait.
Ce registre stylistique s'applique à tous les genres de la peinture coréenne - les cinq consacrés par l'Académie de peinture que sont portrait, le paysage, la peinture animalière, les bambous et les fleurs et oiseaux - qui trouvent une équivalence avec les genres picturaux occidentaux.
Comme le portrait austère des hauts dignitaires et le paysage qui, en l'espèce, n'est pas que simple représentation de l'environnement géographique mais peinture à double degré de lecture.
Ainsi le paysage de montagnes vaut célébration de l'attitude contemplative mais également du dieu de la montagne, dieu primitif et mythologique fondateur de la Corée, vestige d'un culte chamanique, accompagné de son totem, le tigre, qui avec le dragon et le phénix, compose le bestiaire fantastique souvent traité de manière autonome dans le cadre de la très prisée peinture animalière.
Dans ce registre, le graphisme délicat fait merveille pour traiter la faune tant terrestre qu'aquatique et les fleurs, celles-ci participant au motif traditionnel "fleurs et oiseaux" traité sur un mode poétique, et symbolique,car image de la prospérité et du bonheur conjugal, que les apports occidentaux feront évoluer dans la recherche du volume et du rendu de la profondeur et, surtout, l'orientation décorative.
La peinture de genre est également pratiquée avec des scènes de vie quotidienne de l’aristocratie rythmée par le cycle des saisons telles la retraite du général Guo Ziyi et la chasse au tigre, au sanglier et au cerf.
L'exposition, accompagnée d'un dispositif didactique discret mais efficace, induit également une comparaison stylistique avec l'estampe japonaise dont un des maîtres fait l'objet d'une exposition monographique concomitante au Petit Palais ('Kuniyoshi, le démon de l'estampe").
Par ailleurs, le musée accueille dans son Panthéon boudhique les oeuvres d'une artiste contemporaine qui érige en art l'artisanat traditionnel coréen de la broderie exposées sous le "Intérieur coréen, oeuvres de In-Sook Son".
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