Biopic théâtral d'après le récit éponyme de Carole Weisweiller, mise en scène de Pascal Vitiello, avec Bérengère Dautun et Guillaume Bienvenu.
Cocteau 1950. Après une guerre en eaux troubles, le "refroidissement" avec Jean Marais et un tournage de film épuisant, Jean Cocteau rencontre enfin le mécène qui lui permettra, lui, l’homme qui donne tout ce qu’il a, de ne plus se soucier du matériel.
Madame Weisweiller, libre, éprise d’art, épouse de banquier, mère d’une petite Carole, lui offre de passer quelques semaines dans sa villa de Saint-Jean-Cap-Ferrat, "Santo Sospir".
Il y demeurera plus d’une décennie, peignant les murs blancs de ses fresques, composant avec le dernier-aimé, Edouard Dermit et son hôtesse un trio légendaire : bals, croisières, réceptions rythmeront cette vie d’insouciance.
Tout cela implosera à l’orée des années soixante lorsqu’un intriguant et écrivain de seconde zone, Viard, détruira la relation de confiance entre le poète et la milliardaire. Cocteau, renvoyé comme un démarcheur, sa malle sur le palier, en mourra. Madame Weisweiller, peut-être aussi, longtemps après.
Sa fille Carole, qui a si bien connu Cocteau, son précepteur de l’imaginaire, l’a défendu et voulu sauver, trop jeune pour y réussir, a écrit ses souvenirs, bien écrits, ici adaptés pour le Théâtre.
C’est Pascal Vitiello qui assure la mise en scène, onirique et sobre à la fois, utilisant, sans excès, l’image, permettant au poète "resté avec nous" de traverser le miroir dans "Je l'appelais Monsieur Cocteau".
Jean Cocteau est incarné par Guillaume Bienvenu, excellent comédien, infiniment sensible, qui a travaillé avec force son personnage jusqu’à rendre ses intonations, sans caricature. Belle idée que de confier à un jeune homme le rôle du poète à l’éternelle jeunesse.
Quant à la narratrice, Carole Weisweiller, c’est Bérengère Dautun, qui sait dire, évoquer, prononcer l’indicible, comme personne, artiste rare, de la Comédie-Française, mais surtout fille du Verbe. Elle explique, par l’évocation, l’attrait que la petite Carole exerça sur le poète, installant soleil, chemin vers la mer, émerveillement sur les planches juste éclairées d’électricité.
Un moment de grâce, de délicatesse, d’enfance et de poésie rêvée. |