Heureux comme les cerfs-volants
(Social Brain / L'Autre Distribution) février 2016
Tom Poisson, voilà un nom familier pour tout ceux qui ont l’habitude de nager hors des grands courants (désolé) de la chanson française. Voilà plus de dix ans maintenant que l’homme fabrique des chansons, discrètement, en solo ou avec Les Fouteurs de Joie. 12 ans après avoir dit qu’il faisait des chansons, 10 ans après avoir redit qu’il faisait des chansons (Tom 2), le revoilà avec Heureux comme les cerfs-volants.
On l’oublie de plus en plus, mais le rapport à la musique enregistrée passe aussi par le toucher. Avoir l’objet disque dans les mains est un plaisir que le numérique ne pourra, de fait, jamais remplacer. Et dans le cas de Heureux comme les cerfs-volants, ce plaisir est réel. Plus qu’un album, c’est un livre. Non, pas juste les chansons imprimées au format livre, un VRAI livre. Avec une nouvelle de 35 pages. Bref, en plus d’écouter les morceaux, il va falloir que je lise, et que je vous parle de tout ça, ce qui va rallonger ma chronique et vous faire donc perdre du temps à la lire alors que pendant ce temps, vous pourriez commander cet album, l’écouter et le lire par vous-même. Je commencerai donc par la fin pour vous faire gagner du temps : ce disque est superbe, achetez-le.
Ceci dit, appuyons sur le bouton…
Play >
C’est en écoutant ce disque pour la troisième fois que je me suis dit : "Ouah, ça commence comme ça ?!" Je sais, je n’ai pas l’air très malin sur ce coup là, mais c’est bien à la troisième écoute que j’ai percuté sur la beauté de ce premier morceau. Alors je me suis dit que j’avais dû rater bien des choses. J’ai lu les 35 pages, la nouvelle qui accompagne cet album, puis j’ai réécouté. Puis j’ai relu en écoutant.
On peut lire ou écouter, ou faire les deux en même temps, prendre le temps de ne rien faire, de voir quelques amis, de pleurer sur sa vie avant d'en rire un bon coup et de retourner glisser le dernier disque de Tom Poisson sur la platine. Les histoires sont belles, comme l’histoire, les chansons sont inattendues, comme l’histoire, la musique mêle l’acoustique et l’artisanat d’un temps où l’on jouait des chansons avec une guitare autour d’une table de cuisine, avec les synthétiseurs qui ont reconquis le terrain des arrangements des ses dernières années. Comme l’histoire. Et tout ça compose une fable d’aujourd’hui qui aurait aussi bien pu être écrite hier.
Tom nous parle, Tom nous chante, difficile de dire si l’homme qui écrit est chanteur ou comédien. Les musiques savent se faire douces avant de raconter le bonheur avec une évidente simplicité, des ces simplicités dont est fait le bonheur, comme on marche dans la rue d’un pas léger, presque dansant, en sifflotant. Elles nous parlent de la vie, comme le font les chansons, pendant que lui la décrit, la subit, et la prend en note. En douze pièces, Tom Poisson nous livre un conte qui se suffit à lui, mais prend pourtant une autre teinte à la lumière de la nouvelle, qui se suffit également à elle-même. Et il paraît que sur scène les musiciens joueront avec des images qui bougeront toutes seules...
[] Stop
Je ne sais pas si les cerfs-volants sont heureux, mais l’essentiel c’est d’y croire et de s’y plonger, de se laisser porter par le vent en prenant ce qui arrive comme ça arrive. Voilà ce que semble nous dire Monsieur Poisson. C’est facile et c’est réussi. Probablement ce qu’il y a de plus dur à faire.
Et la nouvelle, me direz-vous ? Elle confirme ce que l’on savait déjà : Tom Poisson est un artiste aux multiple talents. De la musique à la comédie en passant par l’écriture (de chansons), la bougre avait déjà de quoi nous rendre jaloux. Voilà qu’il aggrave son cas en ajoutant l’écriture, mais celle des écrivains cette fois.
Dansons et chantons comme on peut, retournons au théâtre, au cinéma. Faisons tout cela mais s'il vous plait avec prudence et masque. Personne n'a envie d'un second confinement n'est ce pas ? En attendant voici le programme de la semaine avec au rayon des replay, la MAG #5 ! (et la #9 aussi bien entendu)