Réalisé par João Nicolau. Portugal/France. Comédie dramatique. 1h30 (Sortie le 25 mai 2016). Avec Júlia Palha, Clara Riedenstein, Filipe Vargas, Adriano Luz, Leonor Silveira, João Xavier, Daniel Cotrim et Vasco Pimentel.
Excellente idée que de sortir ce film frais et coloré pendant que s'achève le terne défilé des films gris cannois.
Il y a quelques années, on avait pu voir un film étrange, "L'épée et la rose" qui détonnait sur la production lusitanienne habituelle et ne ressemblait pas à beaucoup de films d'ailleurs.
L'avait-on apprécié à sa juste valeur en n'y voyant qu'une œuvre touffue et maniérée ? Ce sera la première des questions qu'on se posera en visionnant "John From" de João Nicolau dont "L'épée et la rose" était précisément le premier film. Car la réussite quasi parfaite de "John From" laisse à penser que le premier essai de João Nicolau contenait les promesses qui s'affirment dans le second.
Mais, encore une fois, il faudra faire un petit effort pour entrer dans l'univers fantaisiste pas commun de João Nicolau. Comprendre, notamment, que le petit monde de Rita, adolescente portugaise vivant dans un quartier périphérique de Lisbonne, est vu par le prisme de sa quinze d'années rêveuse.
Une fois assimilé qu'elle transforme son quotidien très quotidien en un feu d'artifice d'artifices, qui la pousse à changer sa banlieue en une petite île mélanésienne où les autochtones attendent un Dieu cargo ou un Dieu avion porteur d'amour et d'aventure, que l'on pourrait appeler "John From..." on sera sur la bonne direction pour profiter de cette jolie bulle de savon cinématographique.
Au lieu de raconter comme tout le monde la naissance du désir chez une adolescente qui a fixé son choix sur un garçon évidemment plus vieux qu'elle, qui normalement ne devrait pas s'intéresser à elle, João Nicolau laisse ce désir tout envahir, tout embaumer, tout embellir.
Le film doit énormément à ces deux jeunes actrices. Rita est omniprésente. Julia Palha la charge de sa juvénile beauté et lui donne une consistance incroyable pour que triomphe sa volonté sur les faits et les choses.
A ses côtés, la rousse Sara, Clara Riedenstein lui offre une amitié particulière et la singularité de ses origines mi-portugaises mi-germaniques. Au lieu de s'ennuyer dans cet été interminable de non-vacances, elles font pétiller leurs jeunes existences en décollage immédiat pour les sensations fortes des premiers vrais émois.
"John From" de Joao Nicolau n'est, au fond, qu'un « teen movie » débarrassé de ses codes américanisés. Qui, en effet, imaginerait dans ce genre de films la présence, en mère de l'héroïne, de Leonor Silveira, la belle Bovary du "Val Abraham" de Manoel de Oliveira ?
Dans son écrin colorié, ce petit bijou de pure fantaisie touchera les amateurs d'un cinéma ni normé ni normal dans lequel rien ne presse à condition que les beaux sentiments soient au rendez vous final.
On souhaite à tous les spectateurs curieux et déraisonnables d'aimer cette délicieuse contre-proposition cinématographique. De toute façon, "John From" de Joao Nicolau ne peut laisser personne indifférent, à l'image de Julia Palha, bien installée dans l'imaginaire de son personnage. |