Réalisé par Pavel Giroud. Cuba. Drame. 1h44 (Sortie le 17 août 2016). Avec Yotuel Romero , Armando Miguel Gómez, Camila Arteche, Yailene Sierra, Jazz Vilá, Jorge Molina Rôle et Broselianda Hernández.
On a vu récemment un film cubain tourné par un Irlandais, "Viva" de Paddy Breathnach, qui ne cachait pas son plaisir de renouer avec le mélo et d'en donner une version moderne.
Sur le papier, "El Acompanante" de Pavel Giroud possède les atouts qui pourraient lui fournir également de quoi revisiter le mélo latino.
Un jeune homme, atteint du SIDA, croise sur sa route un ancien champion de boxe déchu. Ses deux figures quasi antithétiques, l'un incarnant la fragilité et l'autre le machisme, vont, par la grâce de l'habile scénario de Pavel Giroud et d'Alejandro Brugues, devenir des amis, une amitié si forte que la mort attendue n'en aura pas raison.
"El Acompanante" de Pavel Giroud décrit par le détail comment Cuba, en 1986, au début de l'épidémie, rassemblait les malades du sida dans des lieux clos gardés par des militaires où ils étaient soignés à l'écart, des lieux qui étaient des espèces de sanatoriums chargés d'empêcher la propagation de la maladie dont on ignorait encore tous les modes de contamination. Une fois par semaine, les malades pouvaient quitter ces centres, mais pas seuls. On leur adjoignait un "accompagnant".
Dans le film, ce compagnon d'infortune partage aussi le quotidien de la "détention" du malade dont il s’occupe. En effet, il est "puni" parce qu'il est un ex-champion de boxe convaincu de dopage et qui doit justement se réhabiliter au milieu de ces nouveaux pestiférés.
Tout est donc en place pour confronter une fois encore le mâle cubain à ce qu'il redoute le plus : sa part féminine. Car il ignore pourquoi Daniel est là. Et le film, peut-être pour éviter les grosses ficelles mélodramatiques mais au risque de paraître vouloir un peu désamorcé le face-à-face, n'en fait pas un homosexuel mais un soldat contaminé en Afrique.
De toute façon, Pavel Giroud se refuse au voyeurisme et au pathos. Il cherche avant tout à décrire le fonctionnement du centre, développe tout autour de ses deux héros centraux, par ailleurs très charismatiques chacun dans leur genre, une galerie de personnages, malades ou soignants, qui contribue à garantir l'authenticité de son récit.
Au bout du compte, c'est sans effets grandiloquents qu'"El Acompanante" de Pavel Giroud réussit à émouvoir. Parfois, certains éléments scénariques sont attendus comme le combat d'Horacio pour remonter sur le ring et regagner son honneur perdu qu'on suit en parallèle avec la lutte de Daniel contre le mal qui le ronge. Heureusement, d'autres sont plus subtils, comme l'amour torride entre le boxeur et Lisandra la belle malade, qui le fait basculer au-delà de la compréhension et de la compassion...
Si le film est bourré de bons sentiments, il n'est jamais démagogique et sa sincérité en impose. Jamais non plus, il n'exalte ni ne condamne le système imaginé par Cuba au moment où se développe une maladie inconnue et incurable.
Ce témoignage poignant, au-delà du cinéma, fait du bien et devrait convaincre largement. |