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A.I.M.  (Interscope Records)  septembre 2016

La boucle est bouclée. Quelque treize années après ses débuts, M.I.A. multiplie dans ce cinquième disque, le dernier à l’en croire, les références à son propre parcours ; notamment son tout premier album Arular.

Je n’utilise pas le mot "parcours" par hasard. Il s’agit certes d’auto-citations artistiques, mais pas seulement : c’est aussi vers son histoire personnelle que M.I.A. se tourne dans AIM, à la manière de Georges Pérec dans Espèces d’espaces, par exemple. Comme l’écrivain français, la chanteuse anglaise née au Sri Lanka accorde une importance déterminante à la géographie. Mathangi "Maya" Arulpragasam alias M.I.A. est arrivée en Occident en tant que migrante, et cet album est plus que jamais l’occasion de revendiquer ce passé.

Dans la chanson "Visa", M.I.A. va jusqu’à s’auto-sampler : on y retrouve en effet un extrait de "Galang". Je me souviens que j’écoutais la mélodie vocale que M.I.A. a samplée ("Ya Ya haaaaaa... Oh eh oh eh oh oh ya ya yay") comme une sorte d’hymne, comme la bande originale d’un renouveau musical qui allait retourner la pop comme une crêpe. Pas manqué : aujourd’hui, de Santigold à Beyoncé en passant par Rihanna et Nicki Minaj, tout le monde fait du M.I.A..

"Galang” aurait pourtant pu connaître un tout autre parcours. M.I.A. avait initialement enregistré cette chanson, la deuxième qu’elle ait jamais composée, avec l’intention de la soumettre à Elastica pour les encourager à continuer leur chemin musical. Mais sa clairvoyante amie Justine Frischmann l’avait encouragée à se l’approprier, pressentant sans doute la capacité de M.I.A. à inventer un langage musical unique à partir de la boîte à rythmes qu’elle lui avait offerte, et de l’impressionnant aplomb de sa voix, bien entendu. Merci, Justine.

En 1999, il devait se passer de drôles de choses dans la tête de cette jeune Sri-lankaise de 24 ans, débarquée en Angleterre treize ans plus tôt en tant que réfugiée politique, lorsqu’elle rencontra la chanteuse d’Elastica à un concert de Air par l’entremise d’un ami commun (un certain Damon Albarn), et commença à collaborer avec son groupe, signant une pochette de disque et un clip pour Elastica. Parcours croisés. Pour elle, dont le père était l’un des fondateurs d’une force de résistance indépendantiste au Sri Lanka considérée par la CIA et le monde occidental comme terroriste, se retrouver étudiante dans une école d’art londonienne et être entourée d’amis hype n’avait sûrement rien d’évident a priori.

Rien n’est anodin, chez M.I.A. Son plus grand tube "Paper planes" est probablement le hit pop le plus subversif de l’histoire. Utiliser le langage de la musique populaire pour faire passer des messages politiques, personne ne l’a fait aussi bien qu’elle. Dans la géniale "Foreign friend", sur AIM, elle écrit : "I said as a refugee, you know / Where we come from, we get out our tent / Then we climb over the fence / We don’t wanna cause an offense / Then we get a Benz, flatscreen TV, and we pay rent / Then we think we made it / Then we be your foreign friend." ("Là d’où je viens, nous, les réfugiés, nous sortons de nos tentes, nous sautons par-dessus les barrières. On ne cherche pas les ennuis. On bosse pour s’acheter une Benz, un écran plat, pour payer notre loyer. On estime qu’on y est arrivé. Et puis on devient votre ami étranger.") Coucou, Nadine Morano.

Comme d’habitude, le caractère idéologique de sa musique ne prend jamais le dessus sur le plus important : le rythme. La danse… le swag.

Après tout, comme elle le dit elle-même dans "Freedun", son pays n’est ni le Sri Lanka, ni l’Angleterre. Son pays, c’est le "People’s Republic of Swagger-stan" (la "République populaire du Swagistan"). C’est encore moins les Etats-Unis, qui lui mettent bien des bâtons dans les roues pour obtenir son visa et aller y promouvoir AIM. Il faut croire que les autorités n’ont pas apprécié le "middle-finger" qu’elle a adressé à la caméra lors de son passage au Super-Bowl en duo avec Madonna. Parcours censuré.

Comme pour symboliser le bégaiement de l’histoire dont elle parle dans AIM, album largement influencé par la récente crise dite des migrants, la chanson "Bird song" apparaît à deux reprises : une première produite par Diplo,

[collaboration inattendue tant la relation entre les deux anciens comparses s’était tendue ces derniers temps (pour des raisons politiques, évidemment), et une autre, que je préfère largement, par Blaqstarr.

Les deux contiennent en tout cas le même sample tiré d’un film indien.

Quand M.I.A. échantillonne Bollywood, des percussions sri lankaises, voire des sabres chinois comme dans "Swords", la résonance de telles références revêt forcément un aspect authentique, jamais exotisante. Parcours pour témoigner.

Je ne suis pas dupe non plus : je sais bien que M.I.A. fut mariée à un milliardaire, et qu’elle a récemment participé à une campagne de pub pour H&M, World Recycle.

Elle est d’ailleurs la première à être consciente de ses propres contradictions, comme l’indique ces paroles du morceau "Believer",

citées dans un documentaire jamais paru (mais on ne désespère pas qu’il le soit un jour) : "I could be a genius, I could be a cheat. It’s a thin line, and I’m fucking with it." ("Je pourrais être un génie, ou je pourrais être en toc. C’est une frontière ténue, et je fais du trampoline dessus.").

Deux autres chansons de AIM, pour vous convaincre de l’acheter : "Go off",

et "Borders".

 

A lire aussi sur Froggy's Delight :

La chronique de l'album Matangi de M.I.A.
La chronique de l'album MATA - Reality de M.I.A. - Bill Callahan
M.I.A. en concert au Trianon (samedi 11 décembre 2010)
M.I.A. en concert au Zénith de La Villette (dimanche 6 juillet 2014)

En savoir plus :
Le site officiel de M.I.A.
Le Soundcloud de M.I.A.
Le Facebook de M.I.A.


Mickaël Mottet         
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