One man show écrit et interprété par Jean-Hugues Lime Voilà enfin un grand comique qui doit bien mesurer près de deux mètres, ce qui n'est pas forcément la taille rêvée pour faire du stand up dans des cafés-théâtres bas de plafond. Tout de noir vêtu, avec une fine cravate noire, il ressemble à un rockeur finois à l'image de ceux que l'on voit dans les films d'Aki Kaurismaki. Pour couronner le personnage, il a un visage de bandes dessinées, mobile, marqué, aux contours qu'on imagine tracés à l'encre de Chine. Bref, Jean-Hugues Lime semble sorti d'une bédé (pour adultes) de Marcel Gotlib (grande période). Dès qu'il esquisse une mimique des rires fusent. Il y a du clown et du mime en lui et il aurait bien tort de ne pas en profiter. Pourtant, cet ancien du Théâtre de Bouvard, contemporain des célèbres Inconnus et amie de Mimie Mathy, qu'il appelle affectueusement et pour des motifs inavouables par l'acronyme LSD, a depuis ces temps lointains montrer ses talents littéraires. On a pu ainsi lire de lui récemment "L'enfant en fuite", paru au Cherche-Midi, un très beau roman sur les bagnes d'enfant pendant l'Occupation. Ce faux finlandais est donc un fin lettré et on s'en aperçoit très vite dans son spectacle où il enchaîne les mots d'auteurs qu'il emprunte à l'occasion aux plus grands (tels W.C. Fields). Mais, il peut également se montrer d'une extrême mauvaise foi pour s'en prendre, par exemple, aux curés qu'il ne peut imaginer que pédophiles. Il n'hésite pas non plus à recourir à de significatifs accessoires, comme une magnifique perruque blonde, non pas hélas pour imiter Brice de Nice, mais pour passer ses nerfs et sa colère sur une femme politique qui en a subi de plus injustes. Il y a ainsi du Don Quichotte chez ce sang chaud, possédé de temps à autre par une espèce de mélancolie. Car le fil de son spectacle est l'histoire - tiens, tiens ! - d'un comédien qui revient de loin, et qui fait son grand retour sur scène sans qu'on sache très bien s'il ne s'agit pas plutôt de ses débuts. Champion des losers qui finissent toujours par réussir leur échec, il a la maladresse heureuse. Rien n'est réglé au millimètres près chez ce grand non-professionnel à l'américaine. Et, quand il s'aventure à chanter, on est touché par ce faux chansonnier zombie en orbite qui ne maîtrise pas si mal que ça la scène et son sujet buissonnier. Enchaînant les sketches et les textes, il emporte sans problème la conviction et les rires qu'il suscite ont le mérite d'être libres et jamais forcés. Chez lui, pas d'effets au quart de tour et toutes les dix secondes. On rit quand on en a envie , toujours en empathie et, au bout du compte, les rires ne s'épuisent pas dans ce spectacle qui n'a que quelques boulons à serrer pour être sur les rails du succès. On le souhaite à Jean-Hugues Lime qui a bien fait de se faire violence pour re-monter sur scène. |