Réalisé par Mohamed Ben Attia. Tunisie/Belgique/France. Comédie dramatique. 1h33 (Sortie le 28 décembre 2016). Avec Majd Mastoura, Rym Ben Messaoud, Sabah Bouzouita, Hakim Boumessoudi, Omnia Ben Ghali et Arwa Ben Smail.
On sera immédiatement tenté de voir dans "Hedi" de Mohamed Ben Attia, sous-titré d'ailleurs "Un vent de liberté", une parabole de la Tunisie post-Ben Ali qui se cherche après une révolution qui n'a pas forcément tenue toutes ses promesses.
Peut-être vaudra-t-il mieux regarder "Hedi" comme l'histoire d'un personnage tunisien d'aujourd'hui, d'un jeune homme qui cherche soudain à s'émanciper dans une société où, à moins de trente ans, son chemin semble tout, ou trop, tracé.
Si l'on se fie à son générique, où les frères Dardenne apparaissent comme coproducteurs, on retrouvera en "Hedi" un parent des beaux personnages créés par les deux frères belges.
Dans ce film où chacun a ses raisons, où tout a un côté pile et un côté face, où le destin doit compter sur le hasard et l'indécision, sur le va-et-vient d'une caméra entre les visages et les paysages, se joue une vraie histoire cinématographique.
Mohamed Ben Attia réussit avec une grande sérénité à tracer le portrait d'Hedi, à montrer toutes les facettes de la vie d'un jeune Tunisien d'un honnête milieu social. Hedi pourrait se satisfaire d'être "chargé de clientèle" en attendant mieux, accepter en bon fils ou bon frère qu'il est le mariage arrangé avec une gentille et jolie femme qui serait son pendant féminin...
Mais sous le beau soleil de Mahdia, une ville à la plage et au sable qui feront rêver le touriste derrière le cinéphile, les choses ne se passeront pas comme prévu. D'autant que les choses ont la sensualité et la plastique de Rym Ben Messaoud, en femme libre et énergique.
Hedi, en arabe, signifie "calme" ou serein". N'est-ce pas là un handicap pour vivre une passion amoureuse qui nécessite de secouer le cocotier des traditions et de briser net toutes les entraves sociologiques ?
Sous les traits d'Hedi, Majd Mastoura est d'une opacité énigmatique. Peu à peu, pourtant, son visage apparemment inchangé est emporté vers un autre horizon où faire bonne figure ne suffit plus. Il faut choisir au prix du tragique.
"Hedi" de Mohamed Ben Attia cesse vite d'être un petit film aux enjeux connus d'avance pour, avec un minimum d'éléments, surprendre et émouvoir.
Il n'a même pas besoin de choisir une quelconque radicalité, formelle ou scénarique, pour convaincre. En son cœur, en effet, se déploie cette touche d'indicible qui fait les grands films. |