Comédie dramatique de Marie NDiaye, mise en scène de Frédéric Bélier-Garcia, avec Isabelle Carré, Patrick Chesnais, Jean-Charles Clichet, Claire Cochez, Romain Cottard, Jan Hammenecker, Jean-Paul Muel, Chantal Neuwirth, Agnès Pontier et Christelle Tual.

La pièce débute par la victoire écrasante à l’élection municipale d’une ville portuaire de celle que tous appellent "Notre Elue" sur "l’opposant".

Celui-ci, totalement subjugué par le charisme de sa rivale dont il rêve néanmoins de prendre la place, va mettre au point une stratégie de conquête.

Avec "Honneur à notre élue", Marie NDiaye,dans sa langue incisive et poétique, propose une fable politique qui, dans le contexte présent, prend encore plus de saveur. Elle nous offre une plongée dans les arcanes du pouvoir assortie d’une galerie de personnages aussi réels qu’inquiétants.

Des prétendus parents qui réapparaissent soudain (Jean-Paul Muel et Chantal Neuwirth, aussi drôles qu’abjects), des adjoints qui retournent leurs vestes, la pièce de Marie NDiaye fait évoluer tout ce petit monde avide d’influence dans le décor d’une municipalité (salle de cérémonie de l’hôtel de ville aux tapisseries surannées, gymnase, permanence de l’élue…) qui se fondent dans la splendide scénographie de Chantal Thomas.

Frédéric Bélier-Garcia, qui s’était déjà frotté à la langue si particulière de Mare NDiaye, orchestre avec maestria ce vertigineux jeu de pouvoir. Notre Elue (Isabelle Carré, parfaite) dont le rôle déborde dans la vie privée face à un mari dépassé (excellent Romain Cottard) et des enfants qui semblent être des "administrés" ne se dépare jamais, même face aux pires attaques venues de partout, de sa solennité et de son intégrité.

Face à elle, l’opposant (Patrick Chesnais, épatant, dont on avait presque oublié à quel point c’est un exceptionnel comédien) fasciné par Notre élue, semble peu à peu surpris par la violence de la machine qu’il met en marche et sera, à mesure que le pouvoir se rapproche, pris d’une peur irrépressible.

Entouré d’une belle troupe de seconds rôles, tous crédibles (Jean-Charles Clichet, Jan Hammenecker, Agnès Pontier, Christelle Tual), les deux comédiens sont inoubliables dans cette pièce aux confins du fantastique, aussi captivante que burlesque, qui sonde l’inconscient des protagonistes et laisse une impression troublante de malaise sur le monde politique.