Faire paraître un livre avec dans son titre le vocable "Français" qui n'est guère en odeur de sainteté de la bien-pensance actuelle comme trop connoté, voire synonyme de pro-nationaliste accompagné de tout son saint-frusquin réactionnaire, de surcroît précédé de l'article "les" qui aggrave son cas en le faisant virer du côté "français moyen", ne manque pas de panache.

Mais avec six décennies au compteur, trois de scène et la participation à l'émission "Les Grosses Têtes" qui tannent le cuir de la bête pouvant ainsi prêter sans dommage le flanc à la critique, son auteur, l'humoriste Philippe Chevallier, du duo comique Chevallier et Laspalès, spécialiste de l'épinglage de la beaufitude, celui aux airs de ravi de la crèche des publicités pour les assurances, s'est donc lancé dans l'entreprise.

Avec "Les Français et moi", il publie un recueil de textes rédigés à chaud au fil du temps sur des sujets divers et variés dont, cédant, comme il le reconnaît - péché avoué est donc à moitié pardonné - à la tentation narcissique d'en faire profiter autrui, qu'il qualifie de "chroniques drolatiques (enfin j'espère)".

Introduit par une laudative préface du mentor Philippe Bouvard, il comporte plus d'une centaine d'opus, se déployant non de manière chronologique mais regroupés en chapitres thématiques, qui ressortent davantage au billet d'humeur qu'à la chronique littéraire.

En effet, en adéquation avec le naturel et la réputation du citoyen hexagonal considéré comme ronchon et râleur et ayant un avis sur tout et rien, il livre son appréciation personnelle et critique sur les faits et travers sociétaux contemporains avec autant de sagacité que d'humour, parfois avec un brin de mauvaise foi et souvent avec une appétence au calembour à la Vermot.

Sexagénaire qui n'échappe pas au syndrome du rétroviseur, il en est conscient et prend les devants en récusant habilement l'accusation de stérile attitude passéiste en contrecarrant l'antienne "c'était mieux avant" par celle de "c'est pas mieux aujourd'hui".

Comme pour tous les écrits de ce genre, pour éviter la surdose et en apprécier la prose jubilatoire, la lecture à dose homéopathique est recommandée.