Textes de Jehan Rictus interprétés par Eram Sobhani.
Eram Sobhani n'en est pas à son coup d'essai avec le poète des rues Jehan Rictus. Il arrive sur une scène où il "monte" sur une simple palette en bois et, avec la nonchalance adéquate, il commence à interpréter "Les Soliloques du Pauvre". Interpréter plutôt que réciter, car Eram Sobhani n'est pas un lecteur ni un diseur, mais un vrai comédien cherchant la vérité de Rictus. Gabriel Randon (1867-1933) a pris les traits du pauvre Jehan Rictus à la toute fin du 19ème siècle et est lui même monté sur scène pour raconter la geste de ce descendant de François Villon. La voix traînante d'Eram Sobhani et sa forte présence scénique rendent vie à l'oeuvre de Rictus qui frappe par la force de ses images, par le refus de tout lyrisme et, dans le même temps, par une capacité à s'extraire de tout naturalisme. Il y a une modernité qui saisit dans cette poésie rimée mais où les vers ne sont pas ciselés et se font souvent prose.
Récemment, Virus, un rappeur, a enregistré "Les Soliloques du Pauvre" et si l'on compare sa version à celle d'Eram Sobhani, on s'aperçoit combien le texte de Rictus est propice à des jeux différents, à des variations et s'avère un bloc solide quel que soit le sort qu'on lui réserve. Eram Sobhani a l'avantage sur le musicien de ne pas risquer la redondance entre les mots et les notes. Il réussit à donner l'impression que la suite de poèmes qu'il interprète constitue un seul poème. Tenant en haleine son spectateur, son très beau travail pour restituer et ressusciter Jehan Rictus et ses "Soliloques du pauvre" est un modèle du genre. |