Musique sep Théâtre sep Expos sep Cinéma sep Lecture sep Bien Vivre
  Galerie Photos sep Nos Podcasts sep Twitch
 
recherche
recherche
Activer la recherche avancée
Accueil
 
puce puce
puce La Disparition de Josef Mengele
Olivier Guez  (Editions Grasset)  août 2017

Second livre de cette rentrée littéraire pour moi et déjà une bonne pioche avec le dernier ouvrage d’Olivier Guez, La Disparition de Josef Mengele, paru aux éditions Grasset il y a quelques jours. Josef Mengele, "l’ange de la mort", fut médecin tortionnaire à Auschwitz pendant la seconde guerre mondiale.

"A l’époque, croiser son regard et lui adresser la parole étaient interdits ; même ses camarades de l’ordre noir avaient peur de lui. Sur la rampe où l’on triait les juifs d’Europe, il scellait le sort de ses victimes, à gauche la mort immédiate, les chambres à gaz, à droite la mort lente, les travaux forcés ou son laboratoire, le plus grand du monde, qu’il alimentait en "matériel humain adéquat" (nains, géants, estropiés, jumeaux) chaque jour à l’arrivée des convois. Injecter, mesurer, saigner ; découper, assassiner, autopsier ; à sa disposition, un zoo d’enfants cobayes afin de percer les mystères de la gémellité, de produire des surhommes et de rendre les allemandes plus fécondes pour peupler un jour de paysans soldats les territoires de l’Est arrachés aux Slaves et défendre la race nordique" nous précise Olivier Guez. "Gardien de la pureté de la race et alchimiste de l’homme nouveau : une formidable carrière universitaire et la reconnaissance du Reich victorieux le guettaient après guerre". Sauf que, la fin de l’Histoire fut tout autre… Et c’est l’objet du livre d’Olivier Guez.

L’auteur nous fait donc suivre la cavale de Joseph Mengele de 1939, jour où il débarque à Buenos Aires, jusqu’à 1979, lorsqu’il meurt mystérieusement sur une plage brésilienne. En 1939, l’Argentine de Peron est bienveillante, elle ouvre ses portes à des milliers de nazis, de fascistes et de collabos ; des soldats, des ingénieurs, des techniciens, des médecins invités à la doter de barrages, de missiles et de centrales nucléaires pour en faire une superpuissance. Buenos Aires devient en 1940 la capitale des rebuts de l’ordre noir déchu, une sorte de quatrième Reich fantôme composé de nostalgiques.

A travers son livre, Olivier Guez nous dresse le portrait psychologique de Mengele qui multipliera les identités tout au long de sa cavale (Helmut Gregor, Peter Hochbichler, Don Pedro le vieillard sur la fin) sous la forme d’un roman d’espionnage extrêmement précis, montrant comment "l’ange de la mort" a pu échapper à la justice internationale.

Livre passionnant et brillant (l’auteur a fait de nombreuses recherches sur le personnage), il nous décrit un être sans remords, gardant toujours la tête haute tout au long de sa cavale, multipliant sa haine raciste au jour le jour, toujours nostalgique de ses années nazies. Même face à son fils, Rolf qu’il retrouve à Genève et qu’il reverra à la fin de sa vie au Brésil, il se montre imperturbable quand celui-ci en vient à le questionner sur son rôle à Auschwitz. La conversation entre les deux est tout simplement hallucinante, l’un des meilleurs passages du livre pour moi. Les arguments donnés par Mengele pour justifier / expliquer ses actes à Auschwitz sont incroyables. Son fils, aujourd’hui avocat en Bavière, qui a pris le nom de sa femme ne le reverra plus après cette conversation.

Sa cavale est aussi ponctuée de nombreux rebondissements, de la chute de Peron qui le pousse à retourner en Europe (on y voit sa crainte de se rapprocher de ses poursuivants), de son retour ensuite en Argentine où il reprend sa vraie identité, condition pour pouvoir acheter une exploitation (rendu possible par le fait que très rapidement les américains traqueront les communistes et plus les anciens nazis), de son départ enfin vers l’Uruguay puis le Paraguay et le Brésil lorsque Eichmann et ceux qui le traquent (le Mossad) arrivent en Argentine. De sa réaction aussi lorsqu’il apprend la prise d’Eichmann puis sa mort. Lorsqu’il est contrarié, par une mauvaise nouvelle ou par sa femme, ses vieux reflexes de tortionnaire rejaillissent et il s’en prend à ses ouvriers sur son exploitation.

L’homme est traqué, l’étau se ressert souvent autour de lui mais il finit toujours par s’en sortir jusqu’à sa mort, mystérieuse, survenue au Brésil. De nombreux concours de circonstances lui permettent de ne jamais se faire prendre. Il est aussi parfaitement organisé et aussi beaucoup aidé. C’est l’occasion pour Olivier Guez de dénoncer les nombreux Etats Sud-Américains qui ont aidé cette cavale soit en fermant les yeux soit en assumant une complicité, sans oublier les USA qui ont aussi recyclé de nombreux criminels nazis pendant la guerre froide. Au final, sa course contre le temps (son vieillissement et sa déchéance physique ne sont pas oubliés par l’auteur) mais surtout ses déplacements pour échapper aux services secrets israéliens nous tiennent en haleine tout le long du livre.

Olivier Guez a fait le choix d’une écriture distanciée, impartiale, neutre et fidèle. Cela nous mène vers une plongée inouïe au cœur des ténèbres, dans cette cavale incroyable, nous faisant passer par différents sentiments, de la haine, du dégoût et de la jouissance aussi face à la déchéance de ce monstre. On se surprend à apprécier les moments où Mengele souffre, quand il a peur aussi, quand il est triste. Mengele est souvent malade, il a du mal à se faire soigner car il ne veut pas être repéré (l’épisode de l’occlusion intestinale est un régal), il fait souvent des cauchemars qui sont décrits par l’auteur de façon savoureuse aussi.

L’épilogue est fabuleux et conclut parfaitement bien ce très grand livre qu’il faut absolument lire.

 

A lire aussi sur Froggy's Delight :
La chronique de "Le siècle des dictateurs" du même auteur

En savoir plus :
Le site officiel de Olivier Guez
Le Facebook de Olivier Guez


Jean-Louis Zuccolini         
deco
Nouveau Actualités Voir aussi Contact
deco
decodeco

• Edition du 2024-04-21 :
Prendre son souffle - Geneviève Jannelle
Dans le battant des lames - Vincent Constantin
Hervé Le Corre, mélancolie révolutionnaire - Yvan Robin
L'heure du retour - Christopher M. Wood

• Edition du 2024-04-14 :
Mykonos - Olga Duhamel-Noyer
Mort d'une libraire - Alice Slater
L'origine des larmes - Jean-Paul Dubois
 

• Archives :
L'Empire Britannique en guerre - Benoît Rondeau
Des gens drôles - Lucile Commeaux, Adrien Dénouette, Quentin Mével, Guillaume Orignac & Théo Ribeton
La république des imposteurs - Eric Branca
Sub Pop, des losers à la conquête du monde - Jonathan Lopez
L'absence selon Camille - Benjamin Fogel
Anna O - Matthew Blake
Au nord de la frontière - R.J. Ellory
Récifs - Romesh Gunesekera
La sainte paix - André Marois
L'été d'avant - Lisa Gardner
Mirror bay - Catriona Ward
Le masque de Dimitrios - Eric Ambler
Le bureau des prémonitions - Sam Knight
La vie précieuse - Yrsa Daley-Ward
Histoire politique de l'antisémitisme en France - Sous la direction d'Alexandre Bande, Pierre-Jerome Biscarat et Rudy Reichstadt
Disparue à cette adresse - Linwood Barclay
Metropolis - Ben Wilson
Le diable sur mon épaule - Gabino Iglesias
Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême #51 (édition 2024) - Morceaux choisis de la Masterclass de Christophe Blain
Archives de la joie - Le vent Léger - Jean-François Beauchemin
Le fantôme de Suzuko - Vincent Brault
Melody - Martin Suter
Camille s'en va - Thomas Flahaut
Tempo - Martin Dumont
Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême #51 (édition 2024) - Thierry Smolderen : "Le scénario est le bricolage"
Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême #51 (édition 2024) - Top 10 subjectif
Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême #51 (édition 2024) - Nine Antico : Chambre avec vue
Festival International de la Bande Dessinée d'Angoulême #51 (édition 2024) - Moto Hagio : Au-delà des genres
Rock me Amin - Jean-Yves Labat de Rossi
Le Sang des innocents - S. A. Cosby
- les derniers articles (14)
- les derniers expos (36)
- les derniers films (2)
- les derniers interviews (38)
- les derniers livres (2716)
- les derniers spectacles (1)
           
twitch.com/froggysdelight | www.tasteofindie.com   bleu rouge vert métal
 
© froggy's delight 2008
Recherche Avancée Fermer la fenêtre
Rechercher
par mots clés :
Titres  Chroniques
  0 résultat(s) trouvé(s)

Album=Concert=Interview=Oldies but Goodies= Livre=Dossier=Spectacle=Film=