Monologue dramatique de conçu et interprété par Jean-Paul Farré accompagné par la violoniste Muriel Raynaud dans une mise en scène de Ivan Morane.
Août 14... Septembre 14... Et si la guerre de 14-18 n'avait duré que 47 jours ? Et si les Taxis de la Marne n'étaient pas venus changer le cours de la Bataille du même nom ? Jean-Paul Farré a décidé de se lancer dans une "uchronie", c'est-à-dire qu'il change un événement historique et imagine ce qu'il serait advenu alors... Au sens uchronique, le fait que les Allemands gagnent tout de suite la guerre "économise" à la France presque un million et demi de morts. Au sens de l'existence de Jean-Paul Farré, elle lui redonne ses deux grands-pères morts au front dans les années qui suivent... Et c'est beaucoup pour un bonhomme qui pense qu'aimer les gens est d'une importance vitale. S'il avait pu connaître ses grands-pères, les voir vieillir... et mourir, il n'aurait pas eu au-dessus de lui ces deux figures tutélaires figés dans leur jeunesse... Pour donner à son "pavé dans la Marne", toute sa force, il a décidé de partir du général pour aller au particulier. C'est donc un conférencier plutôt primesautier et proche du clown Farré qui énonce les avantages - évidents, sauf pour les Champenois condamnés à rejoindre les Lorrains et les Alsaciens - d'une guerre courte. Sur scène, Ivan Morane a inventé un petit théâtre d'où Jean-Paul joue aux instituteurs sans blouse grise et pointe une carte géographique de l'Europe d'antan. Farré est brillant, clair, concis... gentiment professoral. On suit avec plaisir son exposé. Mais tout bascule quand il l'a terminé et que sa démonstration devient confession. C'est du très grand Farré comédien qui survient alors : pudique, émouvant, humain. Il se fait porte-parole de la génération des petits-enfants des combattants, ceux qui sont nés entre 1950 et 1970 et qui ont connu des grands-parents au souffle asthmatique, des grands-mères veuves depuis quarante ou cinquante ans, ou des photos jaunis de jeunes gens à jamais dans un autre temps... L'écho subtil du violon de Muriel Raynaud qui accompagne les rêves de Farré participe de cette exploration sensible du cœur d'un homme qui parle d'une génération perdue, à qui il aimerait le temps d'un spectacle utopique, redonner l'espoir d'une vie virtuelle ou parallèle. Belle idée pour un beau spectacle. |