Franz Schubert : La Truite - Fantaisie en ut majeur
(Évidence) janvier 2018
"Je suis venu au monde que pour composer" Franz Schubert
Le pianiste Nathanaël Gouin et le violoniste Guillaume Chilemme s’intéressent depuis longtemps à la musique de chambre. C’est avec beaucoup de poésie et de sensibilité qu’ils s’attaquent à la fantaisie en Do Majeur et au quintette avec piano "La truite" et transmettent toute la magie du compositeur Autrichien, ses émotions et ses sentiments, cette capacité à être le reflet, cette transfiguration de nos propres émois.
Dire que la vie de Schubert fut sombre est un euphémisme mais l’été 1819 est comme un rayon de soleil, une véritable accalmie, pour l’une des rares fois de sa (trop courte) vie Schubert est heureux, et cela s’entend. Il s’est éloigné de Vienne, profite de l’existence, de la campagne et de la compagnie d’amis l’hébergeant gracieusement. Une œuvre naîtra grâce à ce bonheur simple : le quintette "la truite". Une de ses rares œuvres au climat vraiment heureux. Preuve de ce bonheur, ces tonalités majeures éclatantes éloignées des tourments des modulations mineures. Il s’agit d’une commande du violoncelliste et ami Sylvestre Paumgartner. Schubert compose ce quintette pour piano, violon, alto, violoncelle et contrebasse dans l’idée de laisser une partie importante au violoncelle, la contrebasse reprenant à son compte le rôle de basse harmonique. Les notes virevoltent, la méditation sereine enchaîne à une certaine allégresse.
La période de composition de la fantaisie pour piano et violon op. 159 est nettement plus sombre et troublée. En 1827, Schubert est bouleversé par la mort de Beethoven qu’il voit comme le miroir de sa propre mort imminente. "Le voyage d’Hiver" en est une évocation. Il reste encore un peu de sérénité chez lui et cela se retrouve dans cette fantaisie, dernière œuvre mettant en duo piano et violon. Œuvre étonnante, elle est bien plus riche et d’une architecture plus complexe que ce à quoi nous pourrions nous attendre de ce genre de pièce. Chaque mouvement se déploie presque indépendamment dévoilant de nombreuses expressions mélodiques. Lyrique et exigeante cette fantaisie, tout comme le quintette demande une virtuosité certaine. Virtuosité que Nathanaël Gouin et Guillaume Chilemne (aidés par Marie Chilemme (alto), Astrig Siranossian (violoncelle) et Émilie Legrand (contrebasse)) montrent tout au long de ce disque.