Monologue dramatique de Copi interprété par Gaël Leveugle. Ecrite en 1974 par le comédien, auteur et dessinateur de bandes dessinées argentin Copi, la partition de "Loretta Strong" met en scène, dans le cadre d'une dystopie apocalyptique, un personnage psychédélique de spationaute, avatar d'une Barbarella échappée d'une Gay Pride.
Ultime terrienne survivante d'une catastrophe cosmique, il lui incombe désormais d'assurer la survie de l'espèce. Mais comment s'y prendre, alors que sévit l'angoisse de la finitude organique, quand on dérive seule dans l'espace et que les géniteurs potentiels sont des plutoniens cannibales ou des rats mordeurs ?
Placé sous le signe du triptyque "trash, punk et porno" des seventies, l'opus se dévide comme un monologue logorrhéique dans lequel sont instillés toutes les récurrences dramaturgiques de l'auteur ordonnées autour du sexe comme creuset des pulsions de vie et de mort et du corps comme lieu de transgression de tous les codes moraux.
Le comédien et performeur Gaël Leveugle s'est approprié l'oeuvre qu'il aborde, indique-t-il dans sa note d'intention, comme "un poème performatif, une blague et une mise en crise de la mimésis théâtrale" qui permet de "penser nos étrangetés et nos monstruosités".
Ainsi il détourne les genres, dont ceux du satirique, du burlesque et du grotesque pratiqués par l'auteur, pour y substituer une dramaturgie du corps convulsif en empruntant aux disciplines du mime, de la danse butoh et de la vocalisation rythmique auxquelles il est formé.
Celle-ci, sous forme performative, constitue une des composantes d'un spectacle magistral conçu également comme un objet plastique placé sous le signe de l'art lumino-cinétique avec les effets optiques conçus par Matthieu Ferry et la musique électronique avec le syncrétisme d'obédience "Ambient" de la bande-son composée par Jean-Philippe Gross.
Gaël Leveugle officie nu le crâne rasé, sans que cette nudité primordiale soit affichée, au centre d'une armature métallique cubique bombardée de lumières qui délimite un espace de jeu concentrationnaire. Pour dispenser magnifiquement le tragique chant du cygne de Loretta Strong. |