"Le scénariste tenait encore le script dans sa main quand on l’a découvert étendu sur son lit d’hôpital. Traumer est mort seul, une nuit, en écrivant la fin du feuilleton qui clôt la dernière saison. Traumer n’a pas écrit le mot fin. Traumer a seulement laissé un blanc après la dernière phrase, après le dernier mot."
Dans le cadre d’une résidence, il a été commandé à cinq écrivains l’écriture d’une brève nouvelle sur le thème du fantastique, susceptible d’être adaptée pour le cinéma sous la forme d’un court-métrage. Pierre Cendors s’est inspiré de cette expérience pour écrire Vie posthume d’Edward Markham, publié aux éditions Le Tripode.
Et ce fut donc pour moi un immense plaisir de retrouver celui qui l’an dernier m’avait ébloui avec, Minuit en mon silence, un très court roman d’une beauté incroyable. Avec ce nouveau livre, Pierre Cendors confirme qu’il est un écrivain incroyable capable de nous transporter en tout juste 100 pages dans une expérience littéraire unique.
Arrivé au crépuscule de sa vie, un scénariste, Todd Traumer se retrouve sollicité pour écrire son chef-d’œuvre : l’ultime épisode de la quatrième dimension, la mythique série télévisée. Le livre de Pierre Cendors, Vie posthume d’Edward Markham, est l’histoire de ce film, et de cet homme. Cet épisode met en scène Damon Usher, interprété par Edward Markham. Celui-ci possède un pouvoir particulier de vision, il travaille pour le gouvernement, réalise une mission qui tourne mal et entraîne des morts.
Pierre Cendors va donc imaginer dans son livre l’ultime épisode d’une série des sixties qu’il a découvert au cours de son adolescence à la fin des années 80. Et cela nous donne un livre surprenant, même si on l’est de moins en moins quand on connaît l’auteur. Les quatre premières pages défilent comme dans un début de film, autour de quatre images formant un compte à rebours nous annonçant qu’on ne sera pas seulement spectateur d’un film mais qu’on sera le film. Drôle de début, me direz-vous, quand on sait que c’est bien un livre qu’on a entre les mains.
Ensuite, point de numérotation de pages, surprenant mais non plus d’une immense originalité. Le reste et le contenu du livre, ensuite, n’en manqueront pas. 24 séquences composent le livre avec une distribution finale du film où le narrateur est Orson Welles.
Le livre ne repose pas sur le déroulement de ce dernier épisode, l’intérêt serait alors très limité et juste imaginatif. Il raconte l’histoire de ce dernier épisode au travers de son personnage, Usher, qui s’entrelace avec celle du scénariste, Traumer, et celle de l’acteur principal, qui donne son titre au livre, Edward Markham. Tous deux arrivés à la fin de leur vie vont faire de cet épisode, sous la plume de l’auteur, leur cérémonie funèbre.
Vie posthume d’Edward Markham est un livre qui pourra s’avérer déroutant, tant il ne ressemble à aucun autre. C’est un livre dans lequel on retrouve les grandes qualités littéraires de son auteur, faites de mélancolies, de poésie, de malice et d’ingéniosité. Pierre Cendors invente le livre film avec sa Vie posthume d’Edward Markham. Et on se dit qu’il y a du génie chez cet écrivain… |