Comédie de René de Obaldia, mise en scène de Patrick Rouzaud, avec Patrick Rouzaud et Mahmoud Ktari. Il est toujours plaisant de voir un opus théâtral de René de Obaldia, comte conteur centenaire consacré immortel au quai Conti, qui a érigé au rang métaphysique le vers de mirliton et, avec l'esprit dans le sillage des grands auteurs de la Belle Epoque, trempé sa plume dans l'encre féconde de la fantaisie cocasse et de l'humour facétieux.
En l'occurrence, Patrick Rouzaud met en scène un de ses premiers et légendaires impromptus, "Le Défunt" qui dynamite la tradition de l'hagiographie posthume dans un dialogue entre deux veuves, et ce, de manière aussi hardie que subtile.
En effet, pour René de Obaldia le théâtre est un jeu, et Patrick Rouzaud propose un spectacle "un-en-deux" qui ressort à la master classe et au bel exercice d'interprétation en plaçant l'opus sous double perfusion méta-théâtrale et sous égide beckettienne, le "en pleurant Victor" se substituant au "en attendant Godot".
Ainsi en propose-t-il deux versions en se référant, sans aucune outrance caricaturale, à des codes de jeu différents, ce qui s'inscrit dans la conception de l'auteur pour qui le théâtre est un jeu dans tous les sens du terme, la première empruntant à ceux du théâtre post-moderne, la seconde à ceux du vaudeville
Et sur scène, deux ouvriers se retrouvent quotidiennement pour répéter, sur le mode de la variation, cette partition loufoque et camper l'ineffable duo constitué par Madame de Crampon, à laquelle Patrick Rouzaud apporte sa maîtrise du jeu non-verbal, et Julie veuve Victor Badouin, avec l'épatante gestion de la déploration par Mahmoud Ktari.
Donc pour le plaisir du jeu pour les officiants et pour boire du petit lait pour les amateurs éclairés. |