Spectacle solo conçu par Jacques Gamblin et Thomas Coville interprété par Jacques Gamblin.
Jadis, comme le poète, on aimait à dire : "Homme libre, tu chériras la mer". Avec Jacques Gamblin et son "Je parle à un homme qui ne tient pas en place", on pourra dire : "Homme libre, tu chériras celui qui chérit celui qui est en mer".
Dans ses précédents seul - ou presque - en scène, l'acteur aux allures de Tintin sans houppette avait décliné ses penchants pour la danse (et le tango en particulier), pour le sport (et ses coureurs répétitifs), aujourd'hui le voilà dans le culte, dans la célébration du navigateur solitaire....
Et pas n'importe lequel de ces nouveaux forçats des mers, puisqu'il va suivre dans une de ses tentatives de record pour traverser les océans plus vite que le vent, l'as des as du moment : Thomas Coville.
Vainqueur de la Transat en double, deuxième de la Transat Anglaise et deux fois troisième de la Route du Rhum, Thomas Coville est surtout détenteur du record du tour du monde en solitaire et sans escale, en 49 jours et quelques poussières de temps.
Dans son spectacle, Gamblin ne célèbre pas le vainqueur mais celui qui se joue de l'adversité pour, sans doute, construire sa victoire future. Derrière son ordinateur, devant un écran vidéo qui occupe toute la scène, l'acteur suit la course folle de son ami.
Il reçoit ses mails en provenance des océans et des tempêtes et lui répond avec lyrisme et humour, exprimant une vraie admiration teintée de crainte pour celui qui, ici, doit rebrousser chemin, affronter l'adversité et, finalement, se montrer aussi grand dans la défaite que dans la victoire et transformer ce contre-temps en matière utile pour façonner sa prochaine victoire.
Gamblin rend vivant cet échange improbable entre l'homme à terre et celui qui s'échine contre les éléments. Sur l'écran où l'on peut suivre à l'aide d'un point jaune qui se fera plus tard balle et ballon, la progression du champion et son brusque arrêt...
Mais, surtout, on peut voir, grâce aux vidéos choisies par le scénographe Pierre Nouvel, d'incroyables plans où l'on se croirait à bord du bolide flottant avec en prime le bruit assourdissant des vagues qui viennent frapper contre la coque du bateau.
Jacques Gamblin, en enfant ébahi, raconte même que, désormais, ces prototypes phénoménaux vont bientôt pouvoir voler. Tabarly en rêvait, les technologies de 2020 le feront.
Emporté par son élan, avec quand même cette distance légèrement flegmatique qu'on lui connaît, Jacques Gamblin semble capable de s'emballer, d'être encore et encore épaté par le monde où vit son ami. Cette capacité d'étonnement est si convaincante qu'il réussit à faire partager son enthousiasme amical.
Même si l'on a de fortes réticences sur ces plaisanciers devenus des sportifs de haut niveau et de très haut risque, même si l'on préférerait que les mers soient plus peuplées de poissons que de navigateurs en régate perpétuelle, on finit par lâcher prise et admettre une certaine beauté dans cet inutile que représentent les courses en mer. |