Comédie dramatique de Nathalie Sarraute, mise en scène de Agnès Galan, avec Nathalie Bienaimé, Gabriel Le Doze, Bernard Bollet et Tristan Le Doze.
Mettre en scène le théâtre appliquant les dogmes du Nouveau Roman consiste un challenge que relève Agnès Galan avec la partition d'une de ses grandes figures, "Elle est là" de Nathalie Sarraute.
Si l'opus applique les principes d'un anti-théâtre consistant en un rejet du personnage et de l'intrigue comme du psychologisme et réalisme, il comporte néanmoins des protagonistes, une situation et un texte, non dépourvu de toute fonction représentative, qui génèrent des interstices permettant au metteur en scène d'échapper à une simple mise en voix et de se raccrocher à une certaine tangibilité.
Car le contenu des échanges n'échappe pas à un certain hermétisme d'autant que, laissé à la divination du spectateur, son sujet n'est jamais clairement énoncé et qu'il ne se semble se révéler tardivement - et de façon aussi laconique que symbolique - par la sentence proverbiale "La vérité triomphe toujours et elle éclaire le monde".
Ainsi un homme fort de sa position et de la décision qu'il a prise (Gabriel Le Doze) soupçonne sa collaboratrice (Nathalie Bienaimé) de nourrir une opinion divergente subversive, ce dont il s'ouvre à un collaborateur (Tristan Le Doze) puis à un ami (Bernard Bollet), et sa conviction, qui demeure dans l'incertitude, tourne à l'obsession. De surcroît, l'intéressée "coupable" se refusant au débat d'idées, il envisage de la dissuader, fût-ce par la force, de poursuivre en cette voie.
Sur le plateau quasi-nu, ce questionnement politique en résonance avec la menace de la bête immonde qui se présente également comme une tragi-comédie du dire et de la responsabilité de la parole, est dispensé de manière émérite par le quatuor dirigé de main de maître par Agnès Galan et emmené par Gabriel Le Doze, excellent dans l'incarnation de l'homme intolérant et de la tentation totalitariste. |