Comédie dramatique écrite et mise en scène par Lazare, avec Anne Baudoux, Laurie Bellanca, Ludmilla Dabo, Marion Faure, Julie Héga, Louis Jeffroy, Olivier Leite, Mourad Musset, Veronika Soboljevski et Julien Villa. Tels trois pieds nickelés, le trio déboule avec fracas sur la scène pour évoquer l'entreprise "Sombre rivière de Lazare (interprété sur scène par Louis Jeffroy) et ses acolytes de monter un spectacle sur les attentats de Paris en novembre 2015.
Reliant ceux-ci aux massacres de Guelma et Setif en 1945 et à son parcours personnel d'artiste, des cités de Bagneux où il a grandi jusqu'à la reconnaissance aujourd'hui, l'auteur-metteur en scène tente d'interroger le monde et évoque la difficulté d'être arabe après les attentats.
Dans la lignée de ses précédents spectacles, Lazare offre un spectacle foutraque et joyeux, un grand bazar dynamique et foisonnant mêlant rap et hip-hop, convoquant Sarah Kane ou Jean-Luc Godard sur une musique éclectique jouée en direct.
Sa poésie naïve aux mots simples ne s'encombre pas de subtilité mais met en évidence des situations bien réelles. Dans ce patchwork désordonné, Lazare (le vrai) avec une intimité touchante se raconte un peu en vidéo, fait parler sa mère (des séquences aussi émouvantes que drôles, avec un fou rire mémorable lorsqu'elle est confrontée aux exigences du cinéma).
Dans ce grand spectacle qui ne se prend jamais au sérieux, Lazare rend hommage aux poètes et à ses nombreux guides, de Shakespeare à Claude Régy, multipliant les clins d'oeil. Il fait apparaître le célèbre Libellule, son alter ego vu la dernière fois dans "Au pied du mur sans porte".
On pourra regretter le manque de trame qui, au bout d'une heure de spectacle, commence à faire défaut (et la rivière de tourner en rond). Les excès de vociférations alors, certes sincères, ne font hélas plus mouche. On aurait aimé également que l'auteur rentre un peu plus dans le fond des sujets.
Les nombreuses idées (pas inintéressantes au demeurant) passent ici à la vitesse d'un cheval au galop, comme un grand défouloir après la barbarie, restituées par une troupe épatante et musicalement impeccable qui ne lâche rien pour transmettre la parole indomptée brute de cet autoportrait éclaté d'un artiste décidément inclassable.
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