Réalisé par Martine Deyres. France. Documentaire. 1h29 (Sortie 5 décembre 2018)
Sous-titré "Une traversée avec Jean Oury", "Le sous-bois des insensés" de Martine Deyres est constitué principalement d'une longue conversation avec Jean Oury, l'un des grands noms de la "psychothérapie institutionnelle" et le fondateur de la célèbre Clinique de la Borde, située près de Cours-Cheverny (Loir-et-Cher).
En 1953, Jean Oury, jeune thérapeute de l'école freudienne, proche de Jacques Lacan,ouvre la Clinique de la Borde,qui accueille encore aujourd'hui 107 patients et un hôpital de jour pour 15 autres.
Associant soignés et soignants, la Clinique de la Borde est loin des institutions qui pratiquaient généralement l'enfermement en cellules et la médicalisation forcée.
Dans "Le Sous-bois des insensés" de Martine Deyes, Jean Oury, mort en 2014, est déjà un vieil homme le dos très voûté. Mais c'est aussi un grand intellectuel malicieux à la voix ferme quoi que chuchotante.
On recommande à tous ceux qui sont passionnés par la psychiatrie ou qui veulent en savoir plus surJean Oury, de prendre des notes pendant la diffusion de ce précieux documentaire. Le professeur s'y révèle un grand pédagogue et un véritable humaniste.
Il met en avant le beau concept de "vaillance". Pour accomplir la tâche qu'il s'est fixé à la création de La Borde, il faut,dit-il, être disponible jour et nuit, accueillir et soigner. Il précise qu'il faut d'abord soigner l'hôpital. Lui qui n'aimait pas la campagne, il se retrouve ainsi au milieu d'un sous-bois, dans une structure ouverte qui veut combattre autant l'aliénation sociale que l'aliénation psychiatrique.
Filmé sans artifice,Jean Oury est passionnant. Il a pour référence le poète grec Pindare : "Partage est notre maître à tous".
Dans "Le sous-bois des insensés" de Martine Deyes, il n'y a pas que la parole du maître des lieux. On y découvre par petits bouts, la clinique de La Borde, et l'on voit bien de ses propres yeux que ce que dit abstraitement Jean Oury. Montrer sans ostentation et avec douceur, La Borde apparaît comme un lieu habité où l'utopie a pu prendre corps.
Ce voyage dans le temps auprès d'un grand contemporain qui a bouleversé la psychiatrie française et l'a fait rayonner dans le monde entier est d'un abord facile. Comme les grands intellectuels, Jean Oury dit des choses simples et que tout le monde peut comprendre. Il faut du temps et une grande pratique pour arriver à un tel niveau d'évidence.V
"Le sous-bois des insensés" de Martine Deyes est un documentaire sans autre ambition que de faire découvrir ce grand monsieur. Mais sa modestie est aussi une belle preuve de sa qualité.
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