Texte de Marguerite Duras dit par Fanny Ardant dans une adaptation et une mise en scène de Bertrand Marcos.
On entend d'abord une voix d'homme dans le noir : "Tu n'as rien vu à Hiroshima". Puis, dans un faible et trouble halo, sa silhouette à elle apparaît du fond de la scène. D'une démarche mal assurée, elle s'avance lentement.
On distingue maintenant son visage et immobile, droite dans toute sa solennité et sa détermination, elle répond à la phrase lapidaire : "Si, j'ai tout vu, tout..."
Cette voix inimitable, chaude au timbre caressant et au phrasé ralenti se prète à merveille à l'écriture brisée de Marguerite Duras, à sa petite musique lancinante. Cette femme, dans ce bouleversant et intense poème d'amour, raconte sa jeunesse à Nevers pendant la guerre et son amour pour un soldat allemand. L'humiliation qui s'en est suivie quand elle a été tondue à la libération.
Adapté et mis en scène avec une sobriété parfaite par Bertrand Marcos (avec qui Fanny Ardant avait déjà joué Marguerite Duras) "Hiroshima mon amour", dont le scénario a été écrit pour le film d'Alain Resnais en 1959, raconte avec émotion une histoire de passion absolue, de mémoire et d'oubli à travers ces deux amours impossibles en lien avec la guerre.
La voix avec laquelle elle dialogue, c'est celle du japonais qu'elle a rencontré dans un Japon contemporain encore marqué par les bombardements atomiques une décennie plus tôt. Les voix du japonais puis de l'allemand, c'est celle de Gérard Depardieu. Choix judicieux de celui qui a tourné lui-même avec Duras et joué de nombreuses fois avec la comédienne.
Quant à Fanny Ardant, qu'on a un réel plaisir à retrouver avec sa sensibilité, son charme et son allure, elle effectue un sans-faute et tout en délivrant de manière poignante, l'oeil plein de malice ou de douleur en un longue confession, le frémissement de l'exaltation, demeure plus que jamais d'une sublime élégance.
Son interprétation d'une extrème finesse, simplement éclairée d'une douche de lumière par Patrick Clitus, touche au coeur les spectateurs qui lui font un triomphe. Ovation qu'elle reçoit avec chaleur, humilité et une vraie émotion, revenant à de multiples reprises pour envoyer des baisers à la cantonnade.
La grande classe. |