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Interview  (Petit Bain, Paris)  mercredi 27 novembre 2018

Peu de temps après la release party à l’occasion de la sortie de leur second album, TOOOD nous avait offert une session, au Petit Bain, dans des conditions exceptionnelles. Cependant, il était un peu tard pour enchaîner avec une interview ce soir-là.

On décide donc de se retrouver quelques jours plus tard dans le XVIIIème arrondissement. La première arrivée sur place est Astrid Karoual, chanteuse mais aussi très impliquée dans les visuels du groupe, que je rejoins bientôt. Le temps de trouver un bar où s’installer du côté du Trianon, nous sommes bientôt rejoints par Laurent Morelli, le deuxième membre du groupe qui, sur scène, assure toutes les parties de guitare. C’est donc autour de trois demis et d’un bol de cacahuètes à décortiquer qu’on évoque Transparence, second album du groupe. Une interview durant laquelle, à plusieurs reprises, l’un des deux commençait une phrase, et l’autre la terminait.

A l’écoute de votre disque, les premières références qui me sont venues à l’esprit étaient des groupes cold wave français de la fin des années 80, comme Babel 17 ou Asylum Party. Or, ce ne sont pas vos influences. D’où vient votre son ?

Laurent Morelli : Déjà, je suis très content que TOOOD soit associé à une scène cold wave française. Si tant est qu’elle existe, j’aimerais beaucoup que nous soyons dedans. Je n’ai pas connu cette scène de la fin des années 80. Ceux qui nous ont influencés étaient plutôt des groupes indie des années 90 et 2000.

Astrid Karoual : Au sens large, nos influences sont un mélange de shoegaze, de trip-hop, et même d’une certaine électro-rock. Vu notre âge, nos influences sont issues de la décennie qui a suivi celle des artistes auxquels tu fais référence. Mais, pour nous, TOOOD est un brassage assez aléatoire de plein de madeleines de Proust sans que, pour autant, nous y restions accrochés. On n’a pas envie d’être des copycats, ni que notre musique réponde à des schémas trop clairs dans la tête des gens. Il y a eu un travail de construction de notre identité qui ne doit pas, du moins nous essayons, se satisfaire d’être une redite de ce qui a été fait auparavant.

Laurent Morelli : En même temps, on n’y pense pas trop. Mais on ne cherche jamais à sonner comme untel ou untel. Même lorsque nous interprétons une reprise, on est assez loin de l’originale. On joue des musiques qu’on aime écouter, mais avec des arrangements qui nous sont propres.

Sur la pochette de Transparence, comme pour celle de votre précédent album, la présentation était assez mystérieuse avec le nom du groupe uniquement indiqué sur la tranche et au verso. N’est-ce pas paradoxal de sortir un disque et de se mettre autant en retrait ?

Astrid Karoual : Parmi les titres, j’ai mis "Transparence" dans une police de caractères plus grosse pour indiquer que c’était le nom de l’album. Mais ce disque n’a pas été conçu comme une succession de singles potentiels. Chaque chanson raconte une histoire, et on a cherché une cohérence entre chaque morceau. C’était moins le cas sur Fury, notre album précédent, parce que c’était la somme de tout ce que nous avions fait jusque-là. Peut-être était-il alors organisé de façon plus ou moins harmonieuse.

Mais Transparence est beaucoup plus compact dans sa conception. On pourrait presque dire qu’il s’agit d’un concept-album en raison du court laps de temps dans lequel on l’a créé. A partir de là, mettre notre nom et un titre ne nous semblait pas avoir trop de sens. C’est plus une succession d’histoires, comme dans un recueil de nouvelles, offertes à l’auditeur et chacun y projette ce qu’il veut. C’est pour cela aussi que les pochettes sont très abstraites.

Là aussi, je relève un paradoxe. L’album est en effet totalement cohérent, mais la pochette est un miroir brisé.

Astrid Karoual : Ce n’est pas un miroir brisé, mais c’est intéressant que tu le voies comme ça.

Laurent Morelli : On essaie de travailler tous les éléments du projet. Donc la pochette de l’album doit être porteuse de signification par elle-même. Comme une musique l’est indépendamment de son titre.

Dans ce cas, dois-je chercher une signification dans le fait que la pochette de l’album précédent, Fury était en noir et blanc, alors que celle de Transparence se décline sur des nuances de gris ?

Laurent Morelli : Dans Transparence, on aborde plusieurs thématiques, dont notre rapport à la mer. La couverture de l’album est une photo de la mer…

Astrid Karoual : … que j’ai prise à Blackpool et que j’ai découpée.

Laurent Morelli : C’est un paysage maritime…

Astrid Karoual : … très serein. C’est Blackpool, l’Angleterre, une photo que j’ai découpée et dont j’ai recollé les morceaux sur un carré noir.

Laurent Morelli : C’est le regard qui est multiple, sur une image certes déstructurée mais calme. L’observateur va chercher à lui donner un sens.

Astrid Karoual : Dans ce découpage, tu as vu un miroir. On a entendu d’autres mots pour le décrire. Mais ce sont plusieurs interprétations d’une réalité simple. A la base, cette photo inspire un calme assez olympien, avec une dimension presque spirituelle tellement cette mer est lisse. Il y a quelques nuages, mais aucune vague, aucune passion véritable ne découle de l’image de départ. C’est le découpage qui va créer le déchirement, et ainsi provoquer une interprétation par celui qui le regarde.

Laurent Morelli : C’est le même travail de réflexion que tu peux faire sur la pochette de Fury qui était une fausse tache de Rorschach.

Les titres sont signés TOOOD. Quels sont vos rôles respectifs au sein du groupe ?

Laurent Morelli : Ça reste un travail à quatre mains, autant sur l’écriture que sur la production. Sur le premier album, c’était beaucoup plus mélangé. Sur celui-ci, l’écriture vient essentiellement d’Astrid et je fais majoritairement la musique. Néanmoins, …

Astrid Karoual : … on n’a pas des positions bornées. On remodifie les textes ensemble, Laurent m’aide. J’interviens aussi dans les arrangements.

Pourquoi le choix d’un album en français après un premier album essentiellement chanté en anglais ?

Laurent Morelli : Sur Fury, il y avait déjà des textes en français. Mais le choix du français, sur Transparence s’est imposé. On est bilingues, on peut écrire en anglais ou en français. Nos premières références étant des groupes anglophones, on a naturellement commencé à travailler en anglais. Ça semblait une évidence. Les textes sont importants et on les soigne vraiment. Or, on a rapidement réalisé que le fait d’écrire en anglais alors que notre public était principalement français faisait que les gens n’écoutaient pas les paroles.

Astrid Karoual : Il y avait un barrage au niveau du sens. Les gens ne percevaient pas la puissance, si je peux m’exprimer ainsi et en toute modestie, de nos textes. On essayait d’avoir une écriture assez littéraire, plus ciselée que la plupart des love songs un peu bateau qu’on peut entendre dans la pop. Le fait de passer au français a été un travail de mise à nu pour moi, mais il y a une compréhension immédiate pour l’auditeur.

C’est une prise de risque qui m’a obligée à me poser des questions sur moi, mon rapport à la langue, ce que je souhaitais faire passer, comment placer ma voix, comment chanter en français sans avoir l’air nunuche. On ne souhaitait pas faire de la chanson, ni du rock français du genre vieille école. On voulait continuer à faire du TOOOD, mais dans notre langue. Et en fait, je m’épanouis énormément dans l’écriture en français.

J’ai d’ailleurs été étonné, à l’écoute du disque, que le mix n’enveloppe pas plus la voix et que celle-ci se retrouve relativement en avant.

Laurent Morelli : Toood 2 par rapport à Toood 1 est un album qui a été pensé pour le live. On avait beaucoup tourné pour Toood 1, et pour cet album on a donc fait le choix que je délaisse les claviers pour la guitare et de mettre la voix plus en avant. Mettre la guitare et voix au premier plan et le reste en instrumentation est la direction qu’on a prise autant sur l’album que pour le live.

Astrid Karoual : Ça ne signifie pas que ce soit une orientation définitive pour autant. Toood 3, comme on aime bien l’appeler, sera certainement différent.

Vous faites tout en auto-production via le label Simple Music For Simple Mind ?

Laurent Morelli : J’ai créé ce label il y a 8 ans. Ça me permet de sortir des productions phonographiques et de défrayer tous les éléments culturels auxquels je participe. Transparence est la sixième référence du label. Cette structure associative nous permet aussi de facturer nos concerts. On est très indépendants. On fait de la musique depuis longtemps, on apprend à tout faire. Mais ce n’est pas par conviction ou militantisme. On n’a pas la volonté de rester dans notre coin toute notre vie. On serait très contents d’envisager d’autres types de collaborations avec d’autres structures.

Comment s’est déroulée la conception de cet album ?

Astrid Karoual : On a écrit, composé et enregistré très rapidement, en deux ou trois mois.

Laurent Morelli : Ensuite, il y a eu six mois de production pour faire une première version. Puis on l’a retravaillé avec des producteurs. Ils nous ont donné leur avis, proposé des pistes pour optimiser certaines choses. Le plus intéressant était que nous avions des retours très différents selon les personnes.

Astrid Karoual : Ensuite, on a refait une V2…

Laurent Morelli : … qui était plus écoutable.

Quels retours avez-vous sur ce disque ? Et comment les recevez-vous ?

Astrid Karoual : Que ce soit des pros, des journalistes, des amis et même des gens qu’on ne connaît pas avec lesquels on parle à l’issue des concerts, tous se montrent très impressionnés par l’utilisation du français. Ils nous disent d’un air surpris, "Le français peut donc sonner de cette façon…". Il y a comme une prise de conscience un peu bizarre autour de ça. Et aussi, on nous parle de musique ambient, cinématographique… En général, à la sortie de nos concerts, les gens qui viennent discuter avec nous évoquent un mélange de sérénité et de passion.

Laurent Morelli : Les retours, autant des pros que du public, sont bons. Ils considèrent qu’on a livré un bon travail, que la production et les textes sont de qualité. D’un autre côté, on entend souvent qu’on n’est pas clairement identifiable par rapport aux courants qui existent aujourd’hui. On a l’impression parfois d’être le bon produit dans le mauvais supermarché.

Astrid Karoual : On aime bien les cases en France, et les gens ne savent pas trop où nous classer. C’est certainement un frein pour se faire connaître. Lorsque des pros s’intéressent à nous, ils trouvent notre musique originale, mais…

Laurent Morelli : … je crois qu’on s’est trompé d’époque et qu’il n’y a pas de scène cold wave française, et francophone, pour nous accueillir. Ça n’empêche pas que parfois on rencontre des groupes qui développent aussi un son cold, mais ça semble en contre-courant par rapport à la scène musicale actuelle. Les gens sortent peut-être plus pour se détendre.

Astrid Karoual : On ne fait pas une musique particulièrement hédoniste, mais je ne crois pas non plus qu’on soit plombant. On pourrait qualifier notre démarche de spleen on the dancefloor. Un peu de mélancolie, de nostalgie, mais je ne pense pas que quiconque ressente une profonde dépression à l’écoute de notre musique. C’est du romantisme plus qu’autre chose.

Laurent Morelli : En musique, il y a des cycles. Depuis quelques années maintenant, on nous assomme avec le retour des années 80, dans lequel on ne s’intègre en effet pas forcément. Le retour des années 90 est peut-être pour bientôt, auquel cas on aurait peut-être plus de chance d’intégrer un mouvement.

L’exercice du remix ne permettrait-il pas de remédier à ça ? Mettre en avant des singles avec des rythmiques plus dansantes par exemple. Ou le projet perdrait-il son âme ?

Laurent Morelli : Lorsque nous avions sorti notre premier EP, nous avions édité une version deluxe, dont il nous reste quelques exemplaires (rires), où tous les titres étaient remixés. Il existe parmi ceux-ci une version house d’un des morceaux, très inspirée d’un groupe allemand, Terranova, et dont nous sommes très fiers.

Astrid Karoual : Actuellement, j’essaie d’approcher des artistes pour avoir des remix, et avoir leur vision.

Laurent Morelli : Mais quel serait l’objectif de remixer nos propres morceaux ? Je ne sais pas.

Une phrase pour définir TOOOD ?

Astrid et Laurent ensemble : Cet obscur objet du désir.

Laurent Morelli : TOOOD, c’est un acronyme pour That Obscure Object Of Desire, mais ce nom est très long. On aime bien les noms de groupe longs, par exemple j’adore I Love You But I’ve Chosen Darkness, super nom de groupe et super groupe. Au bout de quelques années de scène, on s’est rendu compte que les gens ne retenaient pas le nom de notre groupe. Au mieux, ils retenaient Obscure, ou sinon That. Donc on a choisi un acronyme.

Astrid Karoual : Déjà, entre nous, on disait TOOOD. Et nos proches aussi. Finalement, c’est devenu une évidence. Cependant sur le disque, on a précisé That Obscure Objet Of Desire parce qu’il est important que les gens sachent d’où ça vient. Ce n’est pas juste pour le délire de mettre trois "O".

Laurent, un mot pour décrire Astrid. Astrid, un mot pour décrire Laurent.

Astrid Karoual : J’ai sous les yeux un panneau où c’est écrit "Sympa" (magasin de friperie du boulevard de Rochechouart, proche du Trianon). Alors Sympa. (rires)

Laurent Morelli : Partenaire. C’est ma partenaire dans TOOOD. On a les mêmes goûts musicaux mais pas seulement. C’est ce qui fait que c’est fluide et que ça fonctionne bien. On est les deux faces d’une même pièce.

Astrid Karoual : Il est le pile, je suis la face.

Retrouvez TOOOD
en Froggy's Session
pour 4 titres en cliquant ici !

 

En savoir plus :
Le site officiel de TOOOD
Le Bandcamp de TOOOD
Le Soundcloud de TOOOD
Le Facebook de TOOOD

Crédits photos : Thomy Keat (retrouvez toute la série sur Taste Of Indie)


Laurent Coudol         
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