Spectacle conçu par la Compagnie Les Mauvais Elèves, mise en scène de Shirley et Dino, avec Valérian Behar-Bonnet, Elisa Bénizio, Bérénice Coudy et Antoine Richard. Dès le début, on se doute que cette évocation des "grands rôles" à la sauce de la Compagnie Les Mauvais Élèves sera à l'image de leurs précédents spectacles, "Les Amoureux de Marivaux" et "Les amoureux de Shakespeare", à savoir déjantée et irrévérencieuse.
Que se passe t-il en scène quand les accessoires disparaissent, que les comédiens ratent leurs entrées ou font des commentaires ? Proposant un concentré des pires ratages, la petite troupe montre ce qu'on ne voit pas d'ordinaire lors de la représentation : les personnalités envahissantes ou les relations des comédiens entre eux qui rejaillissent sur leurs personnages.
Que se passe t-il si Don Alphonse se met à répondre à Lucrèce Borgia dans son monologue ? Avec "Les Grands Rôles", on aura la réponse à cette question ainsi qu'à plein d'autres. Avec Shirley et Dino à la mise en scène efficace, la troupe a concocté un nouvel opus sur la théâtre, où Hugo télescope Shakespeare, filant à cent à l'heure.
Dans "Les Grands Rôles", Medée est une sud-américaine en robe lamée rouge qui danse le mambo : excellente Elisa Benizio qui joue une coiffeuse spécialisée dans les rôles de nunuches (Juliette ou Nina de La Mouette) mais peut se montrer également surprenante dans l'univers de Shakespeare.
On aura droit à un Roméo version baba-cool interprété par l'aussi inquiétant qu'hilarant Antoine Richard qui est Patrick, un jeune en réinsertion par le théâtre, que l'on retrouvera dans une version inédite de "Cyrano de Bergerac" avec un Christian suicidaire et un Cyrano qui rappe le "non merci" façon Joey Starr.
Bérénice Coudy est une irrésistible Dame patronnesse qui accueille le public puis devient une Roxane remontée qui porte la culotte. Enfin, Valérian Behar-Bonnet campe un acteur acariâtre qui digresse par l'intermédiaire du Lamento du jardinier de Giraudoux ou Jean-Pierre, un jeune premier pédant qui fait entendre son amour des vers dans le récit du combat du Cid ou le "Bon appétit" de Ruy Blas.
Bref, on l'aura compris, "Les Grands rôles", éclairé au poil par Jacques Rouveyrollis, est une fantaisie jubilatoire, folle et explosive qui envoie valser les conventions théâtrales parfois trop empesées. Mais qui est surtout prétexte à libérer l'enthousiasme communicatif d'une bande de chenapans délurés et délirants.
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