Spectacle conçu par Christophe Barbier d'après l'oeuve de Sacha Guitry interprété par Christophe Barbier, Chloé Lambert et Pierre Val.
Le journaliste Christophe Barbier qui manie alertement une plume tant éditoriale que théâtrale a pris goût à la scène et interprète le principal protagoniste de son opus "Moâ, Sacha !".
Un opus consacré au dramaturge, acteur, metteur en scène et réalisateur Sacha Guitry, auteur prolifique notamment de délicieuses comédies ressortant au théâtre de boulevard dont il peaufine les codes à l'aune de l'esprit "à la française" tel qu'il fut à son acmé pendant les Année folles.
Un esprit dont ne manque pas Christophe Barbier qui signe un spectacle roboratif avec, entre biopic et exercice d'admiration, une partition finement élaborée qui en évite les écueils, la pesanteur du premier et l'hagiographique du second, tout en revêtant une forme singulière qui emprunte notamment à la causerie illustrée avec ses inserts en adresse au public.
En effet, elle s'articule autour des tropismes du personnage-titre qui oscillent entre son "Moâ", une passion, celle du théâtre, et deux figures pseudo-castratrices, le père, Lucien Guitry comédien célébrissime en son temps surnommé "Divan le terrible" pour son appétence pour la gent féminine, sur les brisées desquelles il marchera, et "la Femme", avec majuscule, objet de sa collection conjugale.
Par ailleurs, Christophe Barbier a eu l'excellente idée de ne pas écrire un pastiche à la Guitry préférant concocter, à la manière pâtissière et donc gourmande, un divertissant mille-feuille pour trio à la langue déliée.
Car composé de citations, aphorisme et extraits de pièces réunis par des dialogues additionnels bien tournés, il s'articule, de surcroît et à l'exemple du Maître, non seulement sur le paradoxe de l'acteur mais sur un empilement pirandellien de mises en abyme ce qui crée d'aussi inattendues, qu'amusantes et bienvenues ruptures.
Christophe Barbier, qui, en préambule, suscite l'empathie du public par son sens de l'autodérision au regard de sa personne hypermédiatique et médiatisé d'"éditorialiste à l'écharpe rouge qui a un avis sur tout", s'avère drôlissime en Monsieur Moâ et la faconde de Pierre Val lui permet d'être efficacement multi-rôle.
En charge de toutes les femmes fatales qui peuplent le monde de Moâ, ses épouses toutes actrices et les femmes de fiction qu'elles inspirent, Chloé Lambert incarne parfaitement l'archétype de la séduction et la superficialité toutefois non exempte de pragmatisme égocentré. Une friandise à déguster sans modération. |