Mélo burlesque écrit et interprété par Pierre Guillois, Agathe L’Huillier et Olivier Martin-Salvan. Révélation 2014, "Bigre" poursuit son périple artistique pour conquérir de nouveaux spectateurs et le plaisir de le revoir pour ceux déjà conquis.
Judicieusement sous-titré "mélo burlesque", cet époustouflant opus en forme de pantomime conçu et interprété par trois ébouriffants comédiens, Pierre Guillois, Agathe L’Huillier et Olivier Martin-Salvan, décline une variation sur l'anomie urbaine contemporaine et les relations de voisinage en procédant à, une déconstruction des genres et des codes empruntant au music-hall, au cabaret, au boulevard et à la comédie musicale.
Et ce, à travers les pérégrinations "en chambres" d'un trio clownesque hermétique à tout apprentissage et aux prises avec le ratage héroïque qui ne mène à rien et à tout et, peut-être même, au bonheur.
Dans un croquignolet décor genre vue ouverte de maison de poupée de Laura Léonard, au dernier étage, des chambres de bonne transformées en micro-studios du style "boîte à chaussure" avec commodités sur le palier, gros plan sur un "white cube" ultra-connecté à l'allure de cellule psychiatrique d'un geek hystérique de l'hygiène et karaoké-addict, le grenier capharnaum d'un syllogomane et le LDK girly-kitsch d'une miss catastrophe.
Ces "chers" et loufoques voisins, handicapés de la vie grotesques et ambivalents, tour à tour victimes et bourreaux, partageant les mêmes solitude, petitesses et mesquinerie, vont tenter la convivialité, voire plus si affinités dans une suite de mésaventures comiques, de la bouffonnerie au délire absurde.
Dans la veine burlesque d'un Hanok Levin sans paroles et de la philosophie schopenhauerienne au terme de laquelle la vie est une tragédie dans son ensemble et une comédie dans ses détails, le spectacle, perfusé de scènes d'anthologie, s'avère aussi hilarant et jubilatoire qu'édifiant et roboratif.
Il est portée avec maestria par la virtuosité de jeu des auteurs-comédiens inspirés par les grands comiques du cinéma muet avec Laurel (Pierre Guillois en looseur filiforme amateur de lapin) et Hardy (Olivier Martin-Salvan, autiste au physique d'ogre rabelaisien et couinement de castrat) fréquentant Betty Boop (Agathe L’Huillier pimpante et gironde).
Bien évidemment indispensable pour le meilleur et le rire.
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