"J’ai cru qu’ils m’étouffaient. J’ai cru qu’ils effaçaient ce que nous avions vécu. J’ai cru qu’ils étaient des dizaines ou des milliers. J’ai cru qu’ils enlevaient toute trace de toi. J’ai cru qu’ils enlevaient toute trace de moi. Peut-être que le Rwanda et moi ne faisions plus qu’un. Ils nous ont violés au même instant."
Paris 2017. Sacha Alona, ancienne reporter de guerre, reçoit un carnet de lettres gravé d’une fleur. Lui reviennent en mémoire l’odeur de lys et de la vanille et les évènements survenus vingt ans plus tôt.
1994. Afrique. Sacha est envoyée par sa rédaction pour couvrir les premières élections libres en Afrique du Sud. Mais, très vite, une série d’incidents détourne son attention vers le Rwanda voisin, où la tension monte. C’est dans ce pays à feu et à sang qu’elle rencontre Daniel, pris dans une course éperdue pour retrouver les siens, sa femme, et son petit garçon, Joseph, disparus au début du conflit, lorsque les terribles chasses à l’homme ont commencé.
Ces trois êtres auront-ils la moindre chance d’être réunis, dans un pays où le génocide a atteint des sommets de l’horreur ? Pour la première fois de sa vie, devant l’horreur indicible qui se joue sous ses yeux, Sacha va poser son carnet et cesser d’écrire.
J’ai cru qu’ils enlevaient toute trace de toi est le premier roman de Yoan Smadja qui, avant d’écrire, a travaillé dans la collecte de fonds en faveur d’ONG et pour des sociétés du secteur agroalimentaire. Avec ce premier ouvrage, au travers d’un jeune couple et de son enfant, il retrace vingt-cinq ans après de façon bouleversante le génocide rwandais.
Disons-le tout de suite, cet ouvrage de Yoan Smadja est juste superbe, un véritable coup de cœur et une lecture que je ne vais pas oublier. L’ouvrage est construit autour de deux personnages féminins sublimes. L’histoire de Rose et de son mari est juste superbe. Rose est une jeune femme muette mariée à un médecin Tutsi. Elle lui écrit régulièrement des lettres car il est souvent parti en mission. Sacha, elle, est reporter et assiste aux massacres qui vont se dérouler au Rwanda.
Le livre alterne les lettres de Rose envoyées à son mari et le récit consacré à Sacha plongeant le lecteur dans la détresse et de Rose et le chaos auquel est confronté Sacha. Sur le plan historique, il déroule les différents rouages de la mise en place du génocide, que je connais bien pour avoir lu de nombreux ouvrages d’histoires dessus mais aussi de nombreux romans sur le sujet.
Ici, la grande qualité de l’ouvrage vient du fait que l’auteur, en romançant cette tragédie, a pris soin d’y apporter de la tendresse et de l’amour qui rendent le livre particulièrement émouvant lors de sa lecture. Les lettres de Rose à son mari y sont pour beaucoup car elles sont particulièrement belles, empreintes de nostalgie, de romantisme et d’amour.
Alors voilà, ce premier roman de Yoan Smadja témoigne de la révélation d’un véritable écrivain capable de relier magnifiquement le roman à l’histoire, aussi cruelle soit-elle pour proposer au lecteur un ouvrage d’une grande sincérité qui ne laissera pas le lecteur indemne. |