Comédie dramatique d'après le roman éponyme de Irène Némirovsky, mise en scène de Virginie Lemoine, avec Florence Pernel, Béatrice Agenin, Guilaine Londez, Samuel Glaumé, Emmanuelle Bougerol et Cédric Revollon (en alternance avec Gaétan Borg). En préambule, sont projetées des images d'archives représentant Hitler ou Pétain, donnant tout de suite le contexte. En 1941, dans un village de Bourgogne où l'armée allemande vient de s'installer, Madame Angellier, la riche veuve occupant une grande demeure bourgeoise va être obligée d'héberger un officier de la Wehrmacht.
Avant son arrivée, tout a été caché soigneusement. Mais contre toute attente, celui-ci se montre un hôte aussi courtois que mélomane. Même s'il est détesté par la propriétaire à qui la guerre a emmené son fils combattre au loin, la femme de celui-ci, Lucile, trompée dès son mariage, n'est pas insensible aux manières, à la culture et aux charmes de l'officier.
Adaptant au théâtre le chef d'oeuvre d'Irène Némirovsky, morte en déportation en 1942 (et Prix Renaudot 2004 à titre posthume), Virginie Lemoine et Stéphane Laporte en ont gardé le ton et l'humanité des personnages.
La mise en scène efficace et délicate de Virginie Lemoine fait avancer cette histoire prenante tambour battant avec un enchaînement rapide et fluide des scènes. Par petites touches, elle construit cette ambiance délétère où se mêlent néanmoins drôlerie et gravité, dirigeant avec précision des comédiens tous épatants.
Béatrice Agenin compose une maîtresse de maison, toute de noire vêtue, cassante avec sa belle-fille qui peu à peu s'humanise à son contact. Guilaine Londez est grandiose en femme du maire, fausse bigote et vraie entourloupeuse qui, avec son franc-parler et ses tics, produit des moments de franche hilarité.
De même pour Emmanuelle Bougerol époustouflante en bonne râleuse et rebelle. Cédric Revollon (en alternance avec Gaëtan Borg) dont on peut admirer la puissance de jeu est un paysan très convaincant et contribue au côté dramatique.
Quant à Samuel Glaumé, il est absolument crédible en officier allemand, faisant passer toute la complexité de son personnage écartelé entre son poste conjugué à la rigueur allemande et sa sensibilité. Son duo avec Florence Pernel, très émouvante en Lucile, donne la touche romantique à cette passionnante histoire.
Spectacle de facture classique sublimé par les costumes de Christine Chauvey et la musique de Stéphane Corbin, très bien réalisé et emmené par des comédiens formidables, "Suite française" dépeint un tableau très juste de l'occupation et propose de bien beaux portraits de femmes. |